Disparition de Theo Adam : le crépuscule d'un dieu

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Le 10 janvier s’éteignait le baryton-basse Theo Adam dans sa ville natale de Dresde à l’âge de 92 ans. Le chanteur était principalement connu pour ses rôles wagnériens qu’il a interprétés sur les plus grandes scènes, s'imposant comme l’un des plus grands représentants de la musique de Wagner.

Né à Dresde le 1er août 1926, Theo Adam intègre à 10 ans le très renommé Dresdner Kreuzchor où il chantera jusqu'en 1942, date à laquelle il est enrôlé dans l'armée allemande à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il revient ensuite à Dresde dans le but de devenir instituteur, tout en poursuivant l'étude du chant et devient l'élève de Rudolf Dietrich entre 1946 et 1949. Cette année-là, il fait ses débuts sur scène, alors âgé de 23 ans, dans le rôle de l’Ermite dans le Freischütz de Weber au Semperoper de Dresde, scène à laquelle il demeurera extrêmement attaché tout au long de sa carrière. En 1952, il intègre la troupe du Staatsoper de Berlin et fait ses débuts la même année à Bayreuth dans Les Maîtres chanteurs où il côtoie Hans Hotter. Jusqu’à la fin des années 1970, il restera un familier du célèbre festival où sa musicalité, son jeu et les émotions qu’il parvient à transmettre le positionne comme un chanteur majeur du répertoire wagnérien, répertoire dont il incarnera tous les grands rôles (Wotan, le Hollandais, Hans Sachs, Gurnemanz, Amfortas, Titurel, Heinrich l'Oiseleur… au total, pas moins de dix-sept rôles). En 1955, à 29 ans, il devient le plus jeune Kammersänger d'Allemagne.

Suite à ses multiples succès à Bayreuth, le baryton-basse est invité sur les plus grandes scènes, comme à la Royal Opera House de Londres en 1967 où il interprète Wotan dans Die Walküre (un rôle dans lequel il a été particulièrement sollicité tout au long de sa carrière jusqu’en 1980), au Metropolitan Opera de New-York en 1969, alors en Hans Sachs dans Les Maîtres chanteurs ou encore à Vienne, Moscou, Buenos Aires, Rome, Bruxelles, Paris… Parmi ses dernières apparitions en France, on se souvient notamment de son Moïse dans Moïse et Aaron au théâtre du Châtelet en 1990, de son La Roche dans Capriccio de l'Opéra de Paris trois ans plus tard, ou encore Titurel dans le Parsifal signé Klaus Michael Grüber au Châtelet en 1997. Toutefois, s’il s'est  imposé comme une référence du répertoire wagnérien, Theo Adam était également un grand interprète de Bach ou encore de Mendelssohn. Il s’intéressait également à la musique du XXe siècle, surtout à partir des années 1980. Il a magistralement  interprété les oeuvres de Berge, Wozzeck ou Lulu, Les Stigmatisés ou Baal de Schreker, Penthesilea d'Othmar Schoeck, Karl V d'Ernst Krenek, et a participé à la création de plusieurs œuvres, dont Un Re in Ascolto de Luciano Berio en 1984.

Bayreuth n’est pas le seul festival où Theo Adam a brillé : dès 1969, il marque le festival de Salzbourg, par exemple dans Fidelio ou Le Chevalier à la rose. A cette même époque, il se lance dans la mise en scène, un travail qu’il poursuivra jusqu’à la fin de sa carrière. Theo Adam a fait ses adieux au chant en 2006, à Dresde, là où il vivait et où tout a commencé, dans ce même Freischütz avec lequel il avait débuté en 1949.

Outre cette grande carrière scénique, Theo Adam laisse aussi un nombre important d’enregistrements : plus d’une centaine, en matière d’opéras. Parmi ceux-ci, citons les Wotan enregistrés en direct à Bayreuth en 1966 par Karl Böhm, avec Wolfgang Windgassen, Birgit Nilsson, James King, Leonie Rysanek, et celui de la Tétralogie de Marek Janowski à la tête du Staatskapelle de Dresde en 1980. N’oublions pas également Le Vaisseau fantôme sous la direction d'Otto Klemperer à la New Philharmonia en 1968, Fidelio enregistré avec Gwyneth Jones et James King en 1968, ou encore Les Maîtres Chanteurs dirigés par Karajan en 1970 à Dresde. Outre l’opéra, Theo Adam a également enregistré deux oratorios de Mendelssohn : en Elias, dirigé par Wolfgang Sawallisch, et en Paulus, dirigé cette fois par Kurt Masur.

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