
Œuvres de grand répertoire, opéra rare, comédie musicale ou récitals, mais aussi des œuvres adaptées pour tous les publics. L’Opéra de Bordeaux dévoile une saison 2025-2026 placée sous le signe de l’amour et des amours.
C’était l’un des engagements d’Emmanuel Hondré lors de sa nomination à la tête de l’Opéra national de Bordeaux : faire de l’institution bordelaise un « Opéra citoyen » ouvert sur la cité et à tous les publics. Le pari semble réussi : Emmanuel Hondré revendique un solide renouvellement du public (fort de 50% de nouveaux spectateurs chaque saison) et la saison 2025-2026 qu’il vient de dévoiler continue de multiplier les rendez-vous pour tous. La prochaine saison comptera plus de 250 levers de rideaux, qu’il s’agisse de concerts, de récitals ou de spectacles chorégraphiques et lyriques, prenant toutes les formes (de la performance aux ateliers participatifs, en passant par les conférences et rencontres), accessibles dès le plus jeune âge et affichant tous les genres musicaux.
Intitulée « Amour, amours », la saison lyrique apparait tout aussi éclectique et, selon Emmanuel Hondré, s’affiche « aux couleurs de l’amour : celui qui donne des couleurs si imprévisibles à la vie, celui qui a servi à raconter les grands récits (Roméo et Juliette, Porgy & Bess), celui qui a appelé à la liberté des sentiments (La Traviata, Lakmé), celui qui élève l’être humain (Iolanta, La Flûte enchantée), celui qui a inspiré les contes (Peau d’âne, Shéhérazade, Le Prince Ahmed), celui qui nourrit l’amitié (Company), celui qui tend vers l’idéal (Don Quichotte)… »
- Company (Sondheim | Furth), du 24 au 27 septembre
- King Arthur (Purcell | version de concert Le Concert spirituel | Hervé Niquet), le 4 novembre
- Iolanta (Tchaïkovski | Braunschweig), du 12 au 18 novembre
- Porgy and Bess Jazz Club (Gershwin | Bastet), du 4 au 6 décembre
- La Traviata (Verdi | Rambert), du 26 janvier au 3 février
- Lakmé revisited (Académie de l’Opéra National de Bordeaux), du 24 au 26 février
- La Flûte enchantée (Mozart | Duval), du 25 mars au 2 avril
- La Montagne noire (Holmès | Pitoiset), du 19 au 22 mai
- Chantons Roméo et Juliette (Gounod | Boyé), Opéra participatif jeune public les 12 et 13 juin
Opéras de répertoire
Assez classiquement, la saison 2025/26 de l’Opéra de Bordeaux propose des opéras de répertoire, tantôt plutôt courants sur les scènes lyriques, tantôt plus rares – parmi lesquels notamment Iolanta, donné dans une nouvelle production signée par Stéphane Braunschweig. On connait le livret de l’ultime opéra de Tchaïkovski : Iolanta est aveugle et son père entend la préserver des laideurs du monde, jusqu’à ce qu’elle fasse de choix de recouvrer la vue quand elle y est encouragée par l’amour. Dans sa production, Stéphane Braunschweig y voit une forme de « réconciliation avec le monde » donnant, selon le metteur en scène, « toute sa profondeur à cet opéra qui, sous son apparence de simplicité, recèle la beauté fulgurante des chefs-d’œuvre ». Sur scène, l’ouvrage sera défendu par une jeune distribution emmenée par la soprano Claire Antoine dans le rôle-titre, Ain Anger pour incarner son père et Julien Henric dans le rôle de Vaudémont qui ouvre les yeux de la jeune princesse. L’enthousiasmant Pierre Dumoussaud assure la direction musicale de la production.
Autre nouvelle production mais d’une œuvre plus fréquemment donnée, l’institution programme une Flûte enchantée confiée au jeune metteur en scène de théâtre bordelais Julien Duval – qui signait déjà celle d’Il Cappello di paglia di Firenze de Nino Rota in loco en novembre dernier. Il annonce une production devant immerger le spectateur « dans un univers magique où la nature reprend toute sa place, en retrouvant la légèreté de la fable tout en nous conduisant vers l’harmonie entre l’homme et les éléments ». Là encore, le plateau vocal est composé de jeunes interprètes prometteurs : en Tamino et Pamina, le ténor Omar Mancini issu de l’ensemble du Grand Théâtre de Genève et la soprano américaine Elena Villalòn formée notamment au sein de l'ensemble de l'Oper Frankfurt, aux côtés de Julia Knecht en Reine de la nuit, Thomas Dolié et Sofia Kirwan-Baez en Papageno et Papagena, ou encore Jean Teitgen et Mathias Vidal en Sarastro et Monostatos – et Axelle Saint-Cirel en deuxième dame.
L’institution reprend aussi La Traviata dans la fastueuse mise en scène de Pierre Rambert, réunissant une belle distribution emmenée par Slávka Zámečníková dans le rôle-titre, Julien Behr en Alfredo et Ernesto Petti en père Germont, mais aussi Marine Chagnon en Flora Bervoix.
Une rareté, La Montagne noire d’Augusta Holmès
La programmation de l’Opéra de Bordeaux affiche aussi La Montagne noire, d’Augusta Holmès, l’un des très rares opéras composés par une femme à l’époque romantique – La Montagne noire est seulement le deuxième opéra d’une compositrice donné à l’Opéra de Paris, en 1895, après La Esmeralda de Louise Bertin. Inspiré d’un récit serbe, l’ouvrage se déroule sur fond de guerre entre chrétiens orthodoxes et musulmans : les soldats monténégrins Mirko et Aslar sont unis par un serment fraternel, qui sera néanmoins mis à mal par les sentiments que Mirko éprouve pour la jeune Turque Yasmina. Le drame lyrique s’achèvera dramatiquement, sur une partition faisant écho aux styles musicaux de l’époque, influencée par Meyerbeer ou Wagner (que la compositrice a rencontré à Tribschen).
Après une création parisienne, l’ouvrage a été progressivement oublié – avant d’être néanmoins ressuscité notamment au Teater Dortmund début 2024. À son tour, l’Opéra de Bordeaux reprend l'opéra d’Augusta Holmès dans une nouvelle production signée Dominique Pitoiset qui entend montrer « comment un opéra est en perpétuel mouvement, s’amusant à certains moments à faire croire qu'on est encore en répétition, alors que l'on est déjà dans la production ». Aude Extremo, qui interprétait le rôle de Yasmina l’année dernière à Dortmund, le reprend dans la production bordelaise aux côtés notamment de Julien Henric en Mirko. Pierre Dumoussaud dirige l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine. À noter qu’avant de donner la production les 19 et 22 mai 2026, l’Opéra de Bordeaux proposera aussi une table ronde sur la place des compositrices dans le paysage musical d’hier à aujourd’hui en mars, et une conférence de Séverine Garnier autour de La Montagne noire en mai.
Opéras adaptés et récitals
Pour compléter sa saison, l’Opéra de Bordeaux proposera aussi des versions adaptées d’œuvres lyriques. La maison bordelaise reprend notamment son Porgy and Bess Jazz Club étrenné en 2023, une version réduite pour piano et voix du Porgy and Bess de George et Ira Gershwin. La mise en scène efficace d’Emmanuelle Bastet et Tim Northam transpose l’ouvrage de Charleston dans les années 1920 à un club de jazz des années 1950, avec comme en 2023 Joé Bertili dans le rôle de Porgy ou Axelle Fanyo pour interpréter Serena et Clara, mais cette fois Cyrielle Ndjiki Nya pour chanter Bess.
Approche sensiblement similaire pour le projet Lakmé revisited, porté par les jeunes artistes de l’Académie de l’Opéra National de Bordeaux qui, pendant plusieurs mois, ont imaginé « une adaptation libre, moderne et fantaisiste de l’opéra Lakmé de Léo Delibes » dans le cadre d’un grand atelier collaboratif – avec la soprano ukrainienne Oksana Pynchuk dans le rôle-titre.
De même, l’opéra participatif Chantons Roméo et Juliette adapte le Roméo et Juliette de Gounod en « version réduite et ludique » pour les plus jeunes – dès huit ans. Les jeunes participants se préparent dans le cadre d’ateliers, répètent à la maison (sur la base de tuto) et à l’Opéra, avant de se produire sur scène. Une bonne occasion de « se familiariser avec l’opéra en s’initiant au chant et au spectacle vivant ».
L’Opéra de Bordeaux y ajoute également une version de concert de King Arthur de Purcell dirigé par Hervé Niquet à la tête des musiciens du Concert spirituel, mais aussi une série de récitals : Matthias Goerne dans un programme Schubert qu’il maîtrise parfaitement (le 10 octobre), Sabine Devieilhe reprend ses Hymnes à l’amour (le 27 janvier 2026), Sonya Yoncheva dans un répertoire inspiré par son dernier album inspiré de George Sand (5 février), Thomas Dolié pour la Saint-Valentin le 14 février, Benjamin Bernheim dans un récital avec orchestre aux côtés de la cheffe Bar Avni (le 19 février), et puis Pene Pati et Amina Edris en duo dans le répertoire de Puccini, Gounod et Massenet (le 22 mars) ou encore le contre-ténor Jakub Józef Orliński dans un récital baroque autour de Purcell et Haendel.
Le détail de la saison 2025-2026 de l’Opéra de Bordeaux est disponible sur le site de l’établissement.
publié le 6 juin 2025 à 08h54 par Aurelien Pfeffer
06 juin 2025 | Imprimer
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