Saison 2023-2024 : l'opéra contemporain à l'honneur au Metropolitan Opera de New York

Xl_metropolitan-opera-saison-2023-2024 © Met Opera

C’était l’un des engagements de Peter Gelb pour rajeunir et diversifier le public du Metropolitan Opera : dorénavant, toutes les saisons de l’établissement new-yorkais seront ouvertes avec un opéra contemporain. Le Met Opera de New York vient de dévoiler sa saison 2023-2024 et si elle affiche une programmation « resserrée » (avec seulement 18 productions), le directeur du Met Opera y intègre six productions d’œuvres lyriques contemporaines, dont quatre dans de nouvelle production.

Six opéras contemporains

Un tiers des 18 productions de la saison 2023-24 du Met Opera sont des œuvres contemporaines : le 26 septembre 2023, l’établissement new-yorkais ouvrira ainsi sa saison avec une nouvelle production de Dead Man Walking, opéra de Jake Heggie créé en 2000 à San Francisco. La nouvelle mise en scène (initialement prévue il y a deux ans avant d’être reportée pour cause de pandémie) est confiée à Ivo van Hove et dirigée par Yannick Nézet-Séguin avec notamment Joyce DiDonato sur scène – qui interprétait déjà l’œuvre en 2018 au Teatro Real

Début novembre, on retient aussi la production de X: The Life and Times of Malcolm X, opéra militant d’Anthony Davis créé en 1986, proposé ici dans une mise en scène de Robert O’Hara étrennée à l'Opéra de Detroit en mai 2022 et dirigé par le chef Kazem Abdullah. Le baryton Will Liverman y interprète le rôle de Malcom X. Le même mois, le Met Opera enchainera avec Florencia en el Amazonas, opéra de 1996 du compositeur mexicain Daniel Catán, chanté en espagnol notamment par Ailyn Pérez dans le rôle principal, aux côtés de Gabriella Reyes ou encore de Greer Grimsley, dans une production signée par Mary Zimmerman.


Dead Man Walking, Joyce DiDonato (soprano), Ryan McKinny (baryton-basse) (c) Met Opera

En avril 2024, l’oratorio El Niño de John Adams sera l’occasion de réunir la cheffe américaine Marin Alsop, la jeune metteuse en scène Lileana Blain-Cruz (qui proposera une version intégralement mise en scène de l’oratorio pour ses débuts au Met Opera, après avoir marqué le Lincoln Center Theater), avec Julia Bullock sur scène aux côtés notamment de la prometteuse mezzo J'Nai Bridges.

Et on compte également deux reprises contemporaines : d'abord Fire Shut Up in My Bones de Terence Blanchard dans la mise en scène de James Robinson et Camille A. Brown qui peinait à nous convaincre et sera redonnée en avril 2024 ; et ensuite The Hours de Kevin Puts, sauvé par son trio d’interprètes et non des moindres : Joyce DiDonato, Kelli O'Hara et Renée Fleming qu’on retrouvera en mai 2024 sur la scène new-yorkaise. 

Des œuvres de répertoires

La saison compte également deux nouvelles productions d’œuvres de répertoire. La Britannique Carrie Cracknell fera ses débuts au Met Opera en transposant Carmen dans un environnement contemporain, portée par une distribution emmenée la jeune mezzo Aigul Akhmetshina dans le rôle-titre (l'un de ses rôles signatures), aux côtés de Piotr Beczała en Don José et Angel Blue en Micaëla – en alternance respectivement avec Clémentine Margaine, Michael Fabiano et Ailyn Pérez. En février 2024, le Met confiera sa nouvelle Force du Destin au metteur en scène polonais Mariusz Treliński, qui là aussi transpose l’opéra de Verdi dans un décor contemporain. Et sur scène : Lise Davidsen, Brian Jagde, Igor Golovatenko ou encore Ekaterina Semenchuk.


Carmen, par Carrie Cracknell (c) Met Opera

Parmi les reprises notables de la saison 2023-24 du Met, retenons par exemple Un Ballo in Maschera avec Charles Castronovo ; Madame Butterfly dont le rôle-titre sera partagé entre Aleksandra Kurzak, Eleonora Buratto et Asmik Grigorian (qui fera là ses premiers pas sur la scène new-yorkaise) ; Roméo et Juliette de Gounod avec Benjamin Bernheim et Nadine Sierra dans les rôles principaux sous la baguette de Yannick Nézet-Séguin ; Tannhäuser porté par une belle distribution réunissant notamment Andreas Schager, Elza van den Heever ou encore Ekaterina Gubanova ; Turandot dans l’inaltérable mise en scène de Franco Zeffirelli avec Christine Goerke et Roberto Alagna ; ou encore la rare Rondine de Puccini avec Angel Blue et Jonathan Tetelman emmenée par l'énergique cheffe Speranza Scappucci.

Une saison resserrée mais pour un public rajeuni

Cette saison 2023-2024 du Metropolitan Opera parait chiche au regard des précédentes : elle ne compte que 18 productions, cinq de moins que la saison 2022-23 et la plus maigre depuis la saison 1980-81 qui avait été écourtée par des mouvements de grève. Et du fait des difficultés financières de l’établissement new-yorkais, Peter Gelb a notamment dû renoncer à présenter la Sonnambula de Rolando Villazón (le directeur du Met promet qu’elle reviendra dans une future saison), ainsi que la production d’Aida de Michael Mayer qui devait ouvrir la saison avec Angel Blue, reportée à la saison 2024-25.

Pour autant, selon Peter Gelb, cette saison resserrée est l’occasion pour le Met Opera de proposer une offre renouvelée, « plus accessible » et destinée à « un public plus large, plus jeune et plus divers » – incluant donc des œuvres récentes, chantées en anglais ou en espagnol, et réunissant des distributions de jeunes interprètes. Selon Peter Gelb, « l’opéra s’est reposé sur ses lauriers pendant de nombreuses décennies et nous en payons aujourd’hui le prix. Pendant des décennies, la nouvelle musique, tant la musique classique que l’opéra, a fait fuir le public parce qu’elle était inaccessible, atonale et composée pour une élite ».

À l’évidence, pendant des années, le Met s’est reposé sur ses lauriers jusqu’à être considéré comme l’un des temples du classicisme lyrique. Gageons que les nouveaux ouvrages sauront redynamiser la maison new-yorkaise : selon Peter Gelb, les acquéreurs de billets individuels représentent 75 % des ventes du Met Opera et « l'âge moyen d'un acheteur de billets individuels est maintenant de 45 ans, ce qui est remarquablement plus jeune qu'auparavant ». Le patron de la salle new-yorkaise indique cependant « redouter que certains membres plus âgés du public de base ne reviennent jamais » et d’espérer néanmoins que certains d'entre eux auront la curiosité de revenir. On peut sans doute espérer aussi que le Met trouve le juste équilibre entre accessibilité et exigence artistique.

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