Retour sur les Victoires de la Musique Classique 2024

Xl_victoires_2024 © DR

Hier soir se tenait à l’opéra Berlioz Corum de Montpellier la 31ème cérémonie des Victoires de la Musique Classique. Un événement suivi par un grand nombre de téléspectateurs, comme chaque année.

La soirée débutait par un peu de danse dans le hall du Corum (sur l’Ouverture de La Pie voleuse) avant que les caméras ne pénètrent dans la salle où Pene Pati ouvrait la soirée sur La Danza de Rossini, accompagné par l’Orchestre national Montpellier Occitanie dirigé par Michele Spotti. Le choix de l’œuvre ouvrant la soirée n’est bien sûr pas anodin, puisque Rossini est né le 29 février 1792. Stéphane Bern et Clément Rochefort entraient ensuite à leur tour afin de présenter cette cérémonie « placée sous le signe de la paix pour porter haut les valeurs humanistes et pacifistes de la musique ».

En se plaçant sous le thème de la Paix avec la situation politique actuelle, c’est tout naturellement que les Victoires ont ensuite invité la pianiste ukrainienne Anna Fedorova, qui a réussi l’exploit d’atteindre les 41 millions de vus sur YouTube avec le Concerto no.2 de Rachmaninoff. C’est donc le premier mouvement de cette pièce qu’elle a interprété hier soir.

Les prestations lyriques des nommés

Si Rossini était à l’honneur, il en était de même pour Puccini, disparu il y a un siècle. Lauranne Oliva (nommée dans la catégorie des Révélations lyriques) a donc porté son choix sur le doux « O moi babbino caro » de Gianni Schicchi, laissant entendre un beau medium et un aigu ambré très appréciable pour ce timbre de voix. Retour à Rossini avec « Non piu mesta » (La Cenerentola), interprété plus tard par Juliette Mey dont le mezzo a su briller avec une belle maîtrise du vibrato dans une ligne de chant claire de haute voltige aux multiples couleurs. Enfin, Léo Vermot-Desroches a décidé d’interpréter « Dein ist mein ganzes herzes » (Le Pays du Sourire de Franz Léhar), sous la direction non plus de Michele Mariotti mais de Marie Jacquot, elle-même nommée dans la catégorie Révélation chef d’orchestre. Le ténor a laissé entendre ce timbre solaire que nous avons déjà pu apprécier à plusieurs reprises, comme à Dijon en novembre dernier, ou à St-Etienne en juin dernier.

Du côté des nommés « Artistes lyriques », nous n’avons eu le plaisir d’entendre Adèle Charvet, enfant du pays, avec « Parto, ma tu ben mio » (La Clémence de Titus) sous la direction de Philippe Jaroussky et accompagnée de Pierre Genisson (clarinette). Le mariage entre l’instrument et la voix fonctionne parfaitement, le soliste complétant l’orchestre et offrant un partenaire de choix à la mezzo-soprano.

Les remises des prix

La première victoire de la soirée était celle de l’enregistrement de l’année, qui était également un hommage puisque c’est le disque du même nom, Hommage (Erato) qui a remporté ce titre. Il s’agit d’un disque en mémoire à Nicholas Angelich, disparu le 18 avril 2022 à 51 ans seulement. Il avait par ailleurs été deux fois élu Soliste instrumental aux Victoires. Le discours de Gérard Caussé fut un beau moment d’émotion.

L’acteur français Raphaël Personnaz – qui interprète Maurice Ravel dans le film Boléro, d’Anne Fontaine, dont la sortie est prévue le 6 mars – est venu remettre la Victoire du compositeur – ou ici de la compositrice – à Florentine Mulsant pour son Chant du Soleil. Elle n’a pas vu le temps passer depuis ses 10 ans, âge auquel elle a décidé de se consacrer à la composition et souhaite « que la musique nous apporte la paix, si fragile en ce moment dans le monde ».

Pour la troisième fois, c’est à Karine Deshayes que revient le plaisir de remettre la Victoire de la la Révélation artiste lyrique. Et c’est à la mezzo-soprano Juliette Mey entendue un peu plus tôt que ce titre revient. Michele Spotti abandonne pour sa part son pupitre le temps de remettre la Victoire de Révélation chef(fe) d’orchestre à Marie Jacquot.

Il fallait ensuite attendre encore avant que ne soient remis les prix de Soliste instrumental au pianiste Alexandre Kantorow (le seul des trois nommés à ne malheureusement pas être présent physiquement, mais qui l’était virtuellement), puis d’Artiste lyrique. Ce dernier revient à Benjamin Bernheim, déjà détenteur d’une Victoire dans cette catégorie en 2020. Actuellement en répétions à New-York pour Roméo et Juliette (au Metropolitan Opera), il ne pouvait pas être présent lui non plus, mais il a également tenu à l’être par écran.

Enfin, Philippe Jaroussky est revenu afin de remettre pour la première fois la Victoire de la Révélation soliste instrumentale à violiste Salomé Gasselin qui venait tout juste d’interpréter sur scène Les Voix humaines de Marin Marais.

Quelques temps forts

Rachel Willis-Sørensen a offert au public un superbe « Vissi d’arte » (Tosca), d’une belle profondeur et d’une incarnation incandescente, juste avant qu’un hommage soit rendu au chefs d’orchestre japonnais Seiji Ozawa, décédé le 6 février dernier.

Karine Deshayes ne s’est bien sûr pas contenter de remettre un prix et est revenue chanter aux côté de Florian Sempey pour le duo entre Rosine et Figaro, « Dunque io son » (Le Barbier de Séville). Deux rôles qu’ils connaissent et maîtrisent pour les avoir interprétés maintes fois.

La soirée a également laisser entendre le discours de Ludovic Nicot, violoniste de l’Orchestre local, qui appelle les politiques – et la Ministre de la Culture en premier lieu – à ne pas sacrifier la culture, ni la musique.

Un hommage a été rendu à plusieurs artistes de la scène classique qui nous ont quitté, au son du « In Paradisum » du Requiem de Fauré (dont on commémore également le centenaire de la mort) : la compositrice Kaija Saariaho décédée en juin 2023, le pianiste Menahem Pressler, Renata Scotto, décédée en août 2023, James Bowman, Grace Bumbry, décédée en mai 2023, Ewa Podles, décédée en janvier dernier, Virgile Ancely, disparu brutalement en novembre 2023, la violoniste Florence Malgoire, et bien sûr le chef Seiji Ozawa.

Enfin, c'est sur les notes endiablées du « Galop infernal » d'Orphée aux enfers que la soirée s'est achevée, en compagnie de l'ensemble des artistes et d'une bonne humeur communicative.

La cérémonie reste accessible en replay sur le site de France Télévision.

Liste complète des Victoires de la musique classique 2024

  • Victoire soliste instrumental : Alexandre Kantorow, piano
  • Victoire artiste lyrique : Benjamin Bernheim, ténor
  • Victoire compositeurs : Florentine Mulsant - Le Chant du soleil, sonate pour piano à quatre mains
  • Victoire enregistrements : Nicholas Angelich : hommage - Nicholas Angelich, Quatuor Ébène, Martha Argerich, Myung-Whun Chung, Orchestre philharmonique de Radio France, Orchestre national du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev - Erato
  • Victoire Révélation soliste instrumental : Salomé Gasselin, viole de gambe
  • Victoire Révélation artiste lyrique : Juliette Mey, mezzo-soprano
  • Victoire Révélation chef d’orchestre : Marie Jacquot
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