Olivier Lepelletier signe une virevoltante "Vie Parisienne" pour L'Odéon de Marseille

Xl_marc_larcher__le_br_silien__dans_la_vie_parisienne___l_od_on_de_marseille © Marc Larcher

Après La Veuve joyeuse en 2019 et Le Pays du sourire du même Franz Lehar en avril dernier, c’est la troisième fois que nous avons le bonheur d’assister, au Théâtre de L’Odéon de Marseille, à une opérette mise en scène par Olivier Lepelletier, le fringant régisseur général du Moulin Rouge à Paris (que nous avions interviewé l’an passé).


La Vie Parisienne, Théâtre de l'Odéon de Marseille (2022) © Marc Larcher

Comme pour ses deux précédentes productions, son travail est placé sous le signe de l’élégance et du raffinement, du bon goût et de la délicatesse, autant de qualités qui lui ressemblent. Tout à la fois metteur en scène et scénographe (mais aussi éclairagiste !), il transpose l’action dans le Paris rouge et or du Second Empire, et plus exactement dans le décor somptueux du Palais Garnier, à travers son rideau de scène qui est ici démultiplié sur des panneaux fixes ou coulissants. De même, pas de Café anglais au dernier acte, mais les coulisses feutrées du mythique opéra, en l’occurrence le fameux petit foyer de la danse situé derrière la scène (que Robert Carsen a immortalisé dans la dernière scène de sa non moins mythique production de Capriccio avec Renée Fleming). Un nuage qui rend hommage au plafond de Marc Chagall vient par ailleurs faire une apparition, petit clin d’œil au XXème siècle. On lui saura gré de nous éviter la gaudriole et l’humour en-dessous de la ceinture, attachés à tant de productions de l’ouvrage de Jacques Offenbach vues ici ou là.

Seules des pointes d’humour, toujours pleines de tendresse et d’humanité, viennent caractériser les personnages hauts en couleurs imaginés par le compositeur allemand : un Baron au physique mi-Napoléon III, mi-DSK, les deux étant connus pour leur appétit sexuel. Une Baronne, midinette elle aussi, et assoiffée de plaisir ! Un Brésilien rockstar (grimé en Bon Jovi brun !) qui fait s’évanouir les foules avec son physique et son argent. Une Métella aux allures de Callas, d’abord vénale et garce, puis femme avec des sentiments et des désirs. Une gantière un peu évanescente et godiche mais qui, dès que l’occasion lui en ait donnée, se transforme en une sorte de vamp à la Rita Hayworth dans Gilda, à la fois drôle et sexy. Enfin, deux beaux dandies (Gardefeu et Bobinet), profiteurs et opportunistes mais si attachants qu’au final, on pardonne à leur jeunesse… leur physique avenant y aidant aussi ! Bref, une ode à Paris, aux femmes (quelle que soit leur condition sociale), au champagne, à la fête, à la mixité, à l’indulgence et à la tolérance, aux touristes assoiffés de plaisirs... Paris sera toujours Paris !


La Vie Parisienne, Théâtre de l'Odéon de Marseille (2022) © Marc Larcher

Le plateau défend l’ouvrage avec un engagement et un plaisir permanents. Très en voix, Samy Camps campe un Bobinet quelque peu emprunté scéniquement, tandis qu’Alfred Bironien incarne un Gardefeu plus alerte, bien chanté, avec des aigus impeccables. Philippe Ermelier propose un impayable Baron, plus vrai que nature, et dont la faconde et la vis comica sont les principales sources de (ré)jouissances de la soirée. Grand habitué du rôle, Marc Larcher offre au Brésilien (mais également à Frick) sa voix claire et bien placée, aux aigus aussi justes que faciles. Du côté des dames, Laurence Janot campe une voluptueuse Métella, avec le léger grain offenbachien requis par son personnage, mais la voix a désormais tendance à « bouger » plus que permis. La jeune soprano Julia Knecht offre une charmante Gabrielle, tandis que l’encore plus jeune Julie Morgane prête voix et tempérament à Pauline. Quant à Kathia Blas, elle offre un chant agréable à la Baronne. Les petits rôles sont excellents, surtout le délicieux Michel Delfaud dans le triple rôle de Gontran, Urbain et Alfred, à l’impayable accent marseillais, tandis que l'innénarable Antoine Bonelli (Alphonse, le majordome de Gardefeu) passe lui son temps à se plaindre qu’il travaille trop ! Enfin, le Chœur phocéen, habillé de blouses blanches, intervient avec la fantaisie voulue.

Familier de la fosse phocéenne, Emmanuel Trenque se montre particulièrement attentif au plateau, respectueux des équilibres, avec une battue qui laisse à l’Orchestre de l’Odéon sa liberté. La réussite de cette Vie parisienne est aussi là, dans cette lecture impeccable et joyeuse.

Emmanuel Andrieu

La Vie parisienne de Jacques Offenbach au Théâtre de l’Odéon de Marseille, les 15 et 16 janvier 2022

Crédit photographique © Marc Larcher
 

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