La Veuve joyeuse de Lehar prolonge les Fêtes au Théâtre de l'Odéon de Marseille

Xl_p1040712_photo_christian_dresse_2018 © Christian Dresse

La saison de l’Opéra de Marseille ne se résume pas aux titres affichés au sein de son célèbre Opéra municipal Art déco, et aux huit titres du « grand répertoire » s’ajoutent ainsi huit opérettes, toutes représentées au Théâtre de l’Odéon, situé en haut de la mythique Canebière. Souvent donnée pendant les fêtes de fin d’année, La Veuve joyeuse (1905) de Franz Lehar est ici présentée dans sa traduction française (la Marsovie étant donc préférée au Pontévedro). En créant cet ouvrage, le compositeur autrichien a donné à son pays la plus belle preuve d’attachement qu’on puisse rêver, des mélodies qui ont fait le tour du monde, et qui symbolisent une ville, Vienne, mais aussi une époque, un esprit, et une façon de vivre...

Maurice Xiberras avait eu du flair en allant débaucher - il y a deux ans de cela (il s'agit d'une reprise) - Olivier Lepelletier, qui n’est rien moins que le régisseur général du Moulin Rouge (depuis 20 ans), et qui a cherché à rendre à la Veuve son authentique parfum... ce en quoi il a parfaitement réussi ! Gommant les surcharges parfois accumulées, retravaillant le texte quelquefois pesant de Flers et Cavaillet (mais avec les inévitables citations locales et temporelles, des « Gilets jaunes » au « Vieux Port »…), l’homme choyé du music-hall parisien parvient à restituer à l’œuvre toute son authenticité et son cachet exotique, à commencer par des cans-cans endiablés (signés par Esmeralda Albert) qui ont fait chavirer l'audience phocéenne.

La distribution est dominée par la Missia Palmieri de Charlotte Despaux qui se révèle passionnée, charnelle, convaincante dans l’espièglerie de « Ah ! Stupide cavalier », comme dans une « chanson de Vilja » justement applaudie. Elle n’a aucun mal à séduire le sémillant Régis Mengus (aussi brillant Escamillo à Tours qu'exaltant Valentin à Lausanne…) qui endosse ici les habits de Danilo. Sa voix entraîne une forme de nostalgie et, en laissant sourdre sous le costume du débauché une langueur morbide, elle traduit impeccablement les nuances de son personnage. Comédien hors-pair, Olivier Grand est parfait en Popoff, essence même du vaudeville. Caroline Géa ravit en Nadia, canaille à souhait, tandis que Christophe Berry incarne un Camille de Coutançon aussi charmant que léger. Le trio de compères que forment Jacques Lemaire (Figg), Frédéric Cornille (D’Estillac) et Jean-Christophe Born (Lérida) se montre d’une cocasserie totale, tandis que Caroline Clin (Manon) et Simone Burles (Praskovia) ne leur cèdent en rien en drôlerie.

A la tête de l’Orchestre de l’Odéon et du Chœur phocéen, Bruno Membrey dirige avec autant de précision que de ferveur, de langueur que de volupté, et le public marseillais manifeste son enthousiasme en entonnant - à l'unisson de tous les artistes et à plusieurs reprises - le célèbre « Ah les femmes, femmes, femmes… ».

Emmanuel Andrieu

La Veuve joyeuse de Franz Lehar au Théâtre de l’Odéon de Marseille, les 19 & 20 janvier 2019

Crédit photographique © Christian Dresse

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