Jakub Jozef Orlinski offre un programme « recueilli » au Festival de Radio France Occitanie Montpellier

Xl_jakub_jozef_orlinski_au_festival_de_radio_france_montpellier © Luc Jennepin

Les concerts du jeune et bouillonnant contre-ténor polonais Jakub Jozef Orlinski sont toujours une source de joie, et l’on ne se plaindra pas de l’entendre pour la troisième fois en moins d’un an. Après un récital en solo en début de saison à l'Opéra Grand Avignon pour interpréter les airs de son dernier album avec l’ensemble Il Pomo d’oro, puis en duo aux côtés de Lea Desandre au Festival de Pâques d’Aix-en-Provence (où nous l’avions interviewé), c’est à nouveau en solo et avec cette même formation baroque que constitue l’excellent Il Pomo d’oro que nous le retrouvons, toujours dans le Sud de la France, au Festival de Radio France Occitanie Montpellier (nouvellement baptisé FROM).

Toujours aussi avide d’entrer en communication avec son public, il s’essaie à quelques phrases en français avant de reprendre dans la langue de Shakespeare, plus familière pour lui, et nous annonce que nous sommes en quelque sorte des happy few puisqu’il réserve au public de Montpellier la primeur de son prochain disque « Alleluja », composé d’extraits de messes et d’oratorios du XVIIIème siècle (qui sortira à la rentrée). Dirigée ce soir par la violoniste bulgare Zefira Vadova, la formation orchestrale ne compte que sept musiciens. Et pourtant, lors des moments soli qu’ils interprètent tels que la Ciaconna de Brescianello ou un Concerto de Galuppi, la plénitude et la présence du son sont telles qu’on la penserait plus étoffée, quand les nuances et les tempi toujours variés n’ont de cesse de flatter l'ouïe.

Quant aux airs délivrés par Jakub Jozef Orlinski, ceux qui attendaient de la pyrotechnie et de folles vocalises auront été forcément déçus car quasi toute la soirée se déroulera en airs lents et en suaves lamenti, ce qui n'est pas sans entraîner une certaine monotonie à laquelle les concerts du chanteur polonais ne nous avaient pas habitués. On n’en rend pas moins les armes devant la beauté du timbre et la technique sans faille de l’artiste, et ses aigus pleins de douceur et sans la moindre trace d’acidité qui collent parfaitement au répertoire religieux défendu ce soir. Comme à son habitude, il a été chercher des compositeurs peu voire pas connus du tout, et certainement des noms tels que Jan Krtitel Tolar, Lucrezio Nucci ou David Perez ne diront rien au lecteur (qui peut se rassurer… à nous non plus !). Un air tel que le « Giusto Dio » extrait de l’oratorio La Giuditta de Francisco António de Almeida permet au contre-ténor d’exposer une ligne de chant d’une grande élégance au service d’une interprétation lumineuse, constituant certainement le climax émotionnel de la soirée. Le délicat « Dal beato eccelso volo » de Lucrezio Nucci, tiré d’Il David trionfante, fait également partie de ces opus langoureux et purs qui sont sans doute ceux qui conviennent le mieux actuellement au jeune artiste. Mais il n’oublie pas d’inclure quelques airs plus véloces (rares cependant) qui lui permettent d’aller vers la virtuosité dont le public reste si friand. Ainsi du « Gratias agimus tibi » de David Perez, aux nombreux traits rapides, mais plus encore dans le premier bis accordé à un public debout pour remercier son idole en fin de représentation, l’air de Haendel « Agitato da fiere tempeste » tiré de Riccardo Primo, dans lequel fusent les plus folles vocalises. Il lui dit cependant au revoir avec un second bis beaucoup plus dans la tonalité recueillie de son programme avec l’air « Alla gente a Dio diletta », extrait de l’opéra Il Faraone sommerso de Nicola Fago, d’un angélisme à faire pleurer les pierres.

Emmanuel Andrieu

Récital « Alleluja » de Jakub Jozef Orlinski au Festival Radio France Occitanie Montpellier, le 27 juillet 2021

Crédit photographique © Luc Jennepin

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