© AFP - Georg Hochmuth
Après la menace d’annulation de son récital à Prague, Anna Netrebko est à nouveau sous les feux de l’actualité depuis qu’elle a décidé de poursuivre le Metropolitan Opera de New York et son directeur Peter Gelb suite à son éviction de la maison en mars 2022.
Le Metropolitan Opera déjà condamné
Suite à sa décision d’annuler les concerts et participations de la soprano après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la maison new-yorkaise avait déjà été condamnée en mars dernier, dans le cadre d'un arbitrage, à une amende de 200 000 dollars à verser à l’artiste en compensation. Une somme bien inférieure à ce que les avocats d’Anna Netrebko demandaient – à savoir le double. La commission d’arbitrage saisie avait alors pris cette décision en faveur de la cantatrice au nom du dispositif du « pay or play » obligeant les institutions à payer les artistes engagés, même en cas d'éventuelles déprogrammation. La soprano avait également reçu une amende de 30 000 dollars à cause de déclarations « hautement inappropriées », notamment un juron employé dans un message sur les réseaux sociaux.
Des répercutions sur Yusif Eyvazov
Le mari d’Anna Netrebko, le ténor azerbaïdjanais Yusif Eyvazov, s’est lui aussi vu annuler des participations après cette amende. Il devait interpréter Mario Cavaradossi dans la reprise de la Tosca de David McVicar à partir du 30 mars dernier, mais a finalement été remplacé par Matthew Polenzani. Afin de justifier sa décision, le Metropolitan Opera s’appuie sur les commentaires négatifs que le ténor avait tenus à propos du désistement d’Angel Blue lié à la polémique pour un blackface dans Aida à Vérone. Peter Gelb, le directeur du Met, estimait également que la participation de Yuri Eyvazov aurait pu apparaître comme « un manque de respect » à l’égard de la soprano ukrainienne Liudmyla Monastyrska alors attendue dans le rôle principal.
Une nouvelle plainte déposée
On se doute bien que tout cela n’a pas favorisé le retour à un échange cordial entre Anna Netrebko et la maison new-yorkaise. C’est donc dans un contexte quelque peu tendu que la cantatrice poursuit à nouveau Peter Gelb et le Metropolitan Opera devant le tribunal de district américain de Manhattan pour diffamation, rupture de contrat et autres points liés à la décision de l'institution de la licencier à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine. Elle réclame 360 000 dollars de dommages-intérêts pour les frais de représentation et de répétition perdus et affirme que le Met lui a causé « une grave angoisse mentale et une détresse émotionnelle » du fait de sentiment de « dépression, d'humiliation, de gêne, de stress et d'anxiété, ainsi que de la douleur et de la souffrance émotionnelles ». Elle estime avoir été victime de discrimination en raison de son origine nationale et que l’institution ainsi que son directeur « ont nui aux relations avec le public, notamment en encourageant les protestations contre ses prestations ». Il semblerait que la plainte porte également sur une violation d'accords supplémentaires pour 40 représentations de Tosca et La Dame de Pique au cours de la saison 2024-25, ainsi que de Manon Lescaut et Macbeth en 2025-26.
La cantatrice fait par ailleurs valoir le fait qu’elle a dû vendre son appartement new-yorkais à perte et rappelle qu’en raison des exigences du Met Opera voulant qu'elle publie une déclaration publique d'opposition aux actions du gouvernement russe, elle serait devenue la cible de politiciens russes, les compagnies d'opéra russes auraient annulé leurs contrats avec elle, le public russe l'aurait critiquée sur ses réseaux sociaux et dans la presse russe, et sa famille et ses amis restés en Russie ainsi qu’elle-même auraient subi le risque de préjudices et de représailles de la part des autorités locales. Les représentants d’Anna Netrebko ont ajouté : « Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le Met et Peter Gelb ont utilisé Anna Netrebko comme bouc émissaire dans leur campagne pour se distancer de la Russie et soutenir l'Ukraine ».
Bien que la cantatrice soit depuis retournée sur de nombreuses scènes internationales (elle a par exemple ouvert la saison des 100 ans des arènes de Vérone en juin) et qu’elle soit déjà attendue dans diverses grandes maisons pour la saison prochaine, on imagine que la soprano entend envoyer un message aux maisons d’opéra : dénoncer ses futurs engagements sera susceptible d’avoir des conséquences judiciaires et financières. C’est déjà le même message qu’elle adressait aux autorités praguoises qui entendent annuler son récital du 16 octobre prochain.
Le Metropolitan Opera a pour sa part répondu : « Ms. Netrebko’s lawsuit has no merit » (« Le procès de Mme Netrebko n'a aucun fondement ») .
07 août 2023 | Imprimer
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