Valery Gergiev dirige L'Or du Rhin au Festival International d'Edimbourg

Xl_edimbourg © Emmanuel Andrieu

Depuis 1947, la ville d'Edimbourg organise - chaque été au mois d'août - un festival de danse, de théâtre, de musique et d'opéra qui est en quelque sorte l'équivalent des festivals d'Avignon, de Montpellier et d'Aix-en-Provence réunis. Pour la partie lyrique de l'édition 2016, la manifestation écossaise a offert deux opéras en version scénique - la production de Norma par le tandem Caurier/Leiser avec Cecilia Bartoli (vue en début d'année à Monte-Carlo) et la mise en scène de Cosi fan tutte que Christophe Honoré a imaginé pour le dernier festival d'Aix-en-Provence (également chroniquée dans ces colonnes) - mais aussi, c'est le spectacle auquel nous avons assisté, une version de concert de L'Or du Rhin de Richard Wagner dirigée par Valery Gergiev à la tête de son Orchestre du Théâtre Mariinsky.

Un mois après une exécution anthologique de La Walkyrie au Festival d'été de Baden-Baden, c'est une version quasi chambriste, confondante de naturel, de fluidité, de transparence et de poésie - mais jamais réductrice ni minimaliste – que le célèbre chef russe offre à entendre au public très cosmopolite du Festival international d'Edimbourg. Du grand art, dans la mesure où ce lumineux allègement sonore ne se fait jamais au détriment des élans de la partition qui préserve son impact dramatique, ses contrastes et ses couleurs.

Sans exception, la distribution vocale – entièrement issue de la troupe du Mariinsky hors le rôle de Wotan tenu par la basse ukraino-suisse Vitalij Kowaljow – s'avère exemplaire, à commencer par le superbe Alberich de Vladislav Sulimsky, idéalement mordant, totalement investi dans son personnage, et d'une rare émotion. L'autre triomphateur de la soirée est Kowaljow, grâce à son timbre percutant et sa ligne de chant intuitive, jamais pris en défaut par les aigus de sa partie. D'un grand relief également, le Loge de Mikhail Vekua, qui, dans le finale où les Dieux montent au Walhalla, sait abandonner les sonorités cyniques et insidieuses du Dieu du feu et du mensonge pour adopter le timbre claironnant d'un Heldentenor. Evgeny Akhmedov trouve en Froh un emploi exactement adapté à ses possibilités, tandis que Ilya Bannik n'appelle aucun reproche en Donner. De leur côté, les basses Yuri Vorobiev (Fasolt) et Mikhail Petrenko (Fafner) convainquent autant par leur registre grave nourri que par leur phrasé scrupuleusement contrôlé, tandis qu'Andreï Popov campe un Mime apeuré mais fort bien chantant.

Côté dames, les découvertes sont toutes aussi positives. La Fricka d'Ekaterina Semenchuk est une déesse jeune, au timbre débarrassé de toute graisse inutile, et son chant se pare souvent d'une sensualité bienvenue... qui rendrait le personnage presque attachant. Erda, telle qu'elle est incarnée par Anna Kiknadze, se présente également comme un être au timbre plutôt fringant, magnifique de pugnacité dans son avertissement à Wotan. Oksana Shilova est une fraîche Freia, tandis que les Filles du Rhin (Zhanna Dombrovskaya, Yulia Matochkina et Ekaterina Sergeyeva) forment – notamment dans leur intervention dans la scène finale – un trio d'un parfait équilibre vocal.

Emmanuel Andrieu

L'Or du Rhin de Richard Wagner au Festival International d'Edimbourg, le 15 août 2016

Crédit photographique © Dennis Alamanos

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