
Après son « Aida de cristal », Stefano Poda est de retour aux Arènes de Vérone pour y mettre en scène un Nabucco « atomique » : il propose une lecture de l’opéra de Verdi illustrant l’orgueil de l’humanité, qui confine à l’autodestruction.
C’est sans doute le point d’orgue de cette édition 2025 du Festival d’Opéra des Arènes de Vérone : Stefano Poda y signe une nouvelle production de Nabucco. Certes l’opéra de Verdi a déjà été donné à de nombreuses reprises à Vérone (c’est le troisième ouvrage le plus joué dans l'amphithéâtre romain, du haut de ses 239 représentations depuis 1938), mais le metteur en scène entend en proposer une lecture drastiquement modernisée. Après son « Aida de cristal » en 2023 qui reposait sur d’impressionnants effets de lumière et de lasers, Stefano Poda concocte cette fois un Nabucco « atomique ».
Un Nabucco « atomique », ou la mise en garde contre l’orgueil de l’humanité
Stefano Poda part d’un constat : dans l’opéra de Verdi, sur fond d’affrontements entre Babyloniens et Hébreux, des protagonistes s’unissent ou se déchirent, se trahissent ou se réconcilient. Des « opposés s’attirent et se repoussent tout au long de l’œuvre jusqu’à atteindre un point ultime de répulsion et de division, qui conduira à une synthèse finale où les opposés seront de nouveau réunis ». Le metteur en scène y voit une « métaphore des interactions des particules atomiques : la matière nait de l’union de ces particules mais l’humanité a découvert comment briser ces liens, provoquant ainsi une destruction totale » – c’est le principe de la bombe atomique. Il poursuit : « Le progrès technologique rend tout possible, et Nabucco n'hésite pas à utiliser sa supériorité matérielle contre les vaincus, même au prix de conséquences dramatiques : la leçon de ce chef-d'œuvre est que la rationalité, pour être bien intentionnée, ne peut ignorer la spiritualité ».
Nabucco « atomique » aux Arènes de Vérone (concept)
Comme à son habitude, Stefano Poda signe la mise en scène de cette nouvelle production de Nabucco mais aussi les lumières et la chorégraphie, ainsi que les décors et les costumes – la production en revendique 3000 pour 400 artistes sur scène, entre solistes, membres du chœur, mimes et figurants. Il entend ainsi concevoir un « voyage intemporel entre conflit et réconciliation, entre humanisme et technologie, tout en mêlant des références à la peinture baroque ou à des visions futuristes ». Avec l’aide des différents ateliers des Arènes de Vérone et 700 artisans œuvrant en coulisses, la production « combine de grands éléments symboliques et des systèmes d'éclairage innovants mis au service du drame verdien, afin de raconter un conflit d’envergure entre les peuples mais aussi les tiraillements personnels des protagonistes ». Sur scène, un principe de « conflit permanent se décline ainsi à chaque instant dans la mise en scène à travers de multiples visions guerrières, depuis les duels au sabre (de nombreux bretteurs et escrimeurs évoluent sur scène) jusqu’à la menace de missiles atomiques ».
Du passé à un futur hypothétique (ou prophétique ?), le metteur en scène adapte l’opéra de Verdi pour en faire une mise en garde contre l’orgueil de l’humanité et son sentiment de toute puissance – au risque de se confronter à sa propre destruction.
Des distributions d'envergure
À l’occasion de la Journée internationale de la musique, ce 21 juin à partir de 21h20, la télévision publique italienne Rai3 diffuse en direct la captation de cette nouvelle production de Nabucco depuis les Arènes de Vérone afin de « promouvoir le patrimoine lyrique italien » (la captation sera ensuite disponible en replay sur Rai Cultura pour les spectateurs italiens).
Et si la production promet un grand spectacle, les Arènes et la Rai annoncent un dispositif de captation vidéo à l’avenant : des caméras suspendues surplombant la scène, des caméras embarquées sur des drones, des caméras fixes ou mobiles en bord de scène, ainsi que des steadicams sur la scène du « plus grand théâtre à ciel ouvert » au cœur de l’action pour mieux rendre compte de la scénographie.
Pour incarner le concept de Stefano Poda, comme de coutume, le Festival d’opéra des Arènes de Vérone fait appel à plusieurs distributions. La première distribution (de ce 21 juin) est emmenée par le grand baryton verdien Amartuvshin Enkhbat, grand habitué des Arènes, face notamment à l’Abigaille d’Anna Pirozzi. Ils céderont ensuite la scène au Coréen Youngjun Park ou à Luca Salsi dans le rôle-titre face notamment à Anna Netrebko (les 17, 24 et 31 juillet), puis Maria José Siri ou Olga Maslova dans le rôle d’Abigaille.
Plus d'informations sont disponibles sur le site du Festival d'opéra des Arènes de Vérone.
publié le 21 juin 2025 à 13h06 par Aurelien Pfeffer
21 juin 2025 | Imprimer
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