Un livret revisité (dénaturé ?) porté devant les tribunaux

Xl_carmelites © Opera d'Etat de Bavière

Encensées ou conspuées, les productions de l’enfant-terrible Dmitri Tcherniakov ne laissent jamais totalement indifférentes – au point d’être parfois soumises à l’appréciation des tribunaux.

En 2010, le metteur de scène imaginait une nouvelle production des Dialogues des Carmélites de Francis Poulenc pour l'Opéra national de Bavière et déjà, sa réinterprétation du livret suscitait des débats pour le moins passionnés chez les mélomanes. Alors que la production est redonnée dans l’établissement munichois ce dimanche 28 octobre, puis les 1er et 4 novembre prochain, les héritiers du compositeur saisissent les tribunaux afin d’empêcher les représentations de l’œuvre, trop largement réinterprétée à leur goût.
À l’origine du différend, une réécriture du livret original de Georges Bernanos. Outre que l’oeuvre est transposée dans l’URSS des années 60, Dmitri Tcherniakov prend le contre-pied de l’épilogue dramatique du livret. Là où Poulenc et Bernanos faisaient mourir une à une seize carmélites exécutées en martyr durant la Révolution français au nom d’une foi justifiant le sacrifice ultime, le metteur en scène russe préfère les sauver d’un suicide collectif (par le personnage de sœur Blanche, qui mourra néanmoins accidentellement) comme pour affirmer que la vie doit primer.
Deux approches évidemment diamétralement opposées de l’œuvre, qui interrogent plus largement sur la liberté créatrice laissée (ou non) au metteur en scène et le respect dû (ou non) à l’opéra original tel qu’il était imaginé par le compositeur et son librettiste. En attendant que le litige ne soit tranché par les tribunaux, l'Opéra national de Bavière, conformément aux demandes des ayants-droits, informe la presse et les spectateurs du litige en instance.

Et pour mémoire, ce n’est pas la première fois qu’une production de Dmitri Tcherniakov est soumise à l’appréciation des juges. Déjà en avril dernier, son interprétation de Ruslan et Ludmila (l’opéra de Mikhaïl Glinka, alors transposé au XXIème siècle) créée à l’occasion de la réouverture du Bolchoï en octobre 2011 avait suscité l’ire d’une moscovite y voyant « une dénaturation de la culture russe », « évoquant une débauche sexuelle alcoolisée ». En avril dernier, la justice russe déboutait la spectatrice choquée et la production de Dmitri Tcherniakov est restée à l’affiche du Bolshoï jusqu’en février.

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