Reconfinement : un air de déjà vu pour les opéras

Xl_opera-bastille-simon-chaput-onp © DR

On s'y attendait sans vraiment s'y attendre : hier soir, lors de son allocution, le Président de la République a annoncé un second confinement qui débutera cette nuit, entraînant notamment la fermeture des commerces dits "non essentiels" et, dans cette même logique gouvernementale, celle des lieux de spectacle.

Pourtant, les opéras et autres lieux culturels n'ont eu de cesse de s'adapter et de se plier aux multiples exigences : mesures sanitaires strictes, jauge réduite, couvre-feu et décalage des horaires,... On ne peut que saluer les efforts multipliés par les maisons lyriques qui, malgré la tourmente, semblaient bel et bien maintenir leur cap contre vents et marées. Las, une nouvelle vague vient à nouveau chambouler le navire, et ce confinement entraîne déjà une nouvelle série d'annonces d'annulations. C'est notamment le cas, par exemple, du Théâtre des Champs-Elysées qui est "dans l’obligation d’annuler les 17 représentations programmées au mois de novembre". L'Opéra de Lyon ne s'est pas encore prononcé officiellement, mais le Werther qui devait ouvrir la saison officiellement le 20 novembre prochain devrait, logiquement, être annulé, à moins d'un possible report puisqu'il s'agissait d'une version de concert. De même pour le récital de Sabine Devieilhe qui devait se tenir quelques jours plus tard. L'Opéra d'Angers-Nantes a de son côté déjà fait savoir que toutes ses manifestations sont annulées jusqu’au dimanche 6 décembre inclus.

L'Opéra de Paris a lui aussi indiqué que "suite à l'annonce de la fermeture des établissements accueillant du public du 30/10 au 01/12, l'Opéra de Paris est malheureusement contraint d'adapter à nouveau sa programmation et son activité". Autrement dit, là aussi, l'ensemble des représentation prévue durant cette période est annulée (plus d'informations sur le site officiel). Néanmoins, Alexander Neef ajoute : "nous mettons tout en œuvre pour être en mesure de reprendre nos spectacles dès que nous y seront autorisés. Les répétitions des spectacles prévus en décembre se poursuivront dans les prochaines semaines. Nous espérons ainsi être en mesure d'enregistrer et de diffuser L'Anneau du Nibelung de Richard Wagner, à la fin du mois de novembre. Nous examinons également la possibilité d'adapter la programmation de cette œuvre à l'Auditorium de Radio France, au début du mois de décembre, ainsi que de reprogrammer en fin d'année le ballet Chorégraphes contemporains, créer aujourd’hui qui devait débuter le 4 novembre". La Philharmonie de Paris a elle aussi fait savoir que l'ensemble de sa programmation "jusqu’au mardi 1er décembre au minimum" est annulée. Nul doute donc que ce genre de message devrait se multiplier d'ici demain, mais les maisons ont déjà une première expérience et il reste à présent à savoir comment elles parviendront une nouvelle fois à garder un lien avec un public qui était pourtant heureux de pouvoir retrouver les artistes sur scène. La Ministre de la Culture Roselyne Bachelot a d'ailleurs réuni en visioconférence les organisations syndicales représentatives du secteur, les directeurs et délégués généraux et le secrétariat général pour préparer leur fonctionnement dans ce contexte de crise. "Nous sommes en ordre de bataille, et nous allons faire face" annonce-t-elle. Cela n'empêche pas l'inquiétude générale du monde musical qui risque d'avoir plus de mal à se remettre de cette seconde vague, mais qui a l'expérience de la première.

Il faut dire que l'exemple de plusieurs pays européens n'est pas encourageant. En Allemagne, l'épidémie se propage également rapidement et les chaînes de contaminations ne peuvent plus être retracées. En conséquence, le gouvernement fédéral et les Länder restreignent drastiquement la circulation des Allemands (interdisant les déplacements touristiques) et les activités sur le territoire, incluant les « événements de divertissement ». À partir de ce lundi 2 novembre, les maisons d'opéra allemandes fermeront donc leurs portes. Même approche en Suisse où le canton de Zurich interdit les rassemblements de plus de 50 personnes, entraînant la fermeture de plusieurs salles de spectacles, incuant l'Opéra de Zurich.
La Grande-Bretagne fait grise mine également : selon une récente étude de Media Insight Consulting, ce sont 170 000 emplois qui devraient dispraître d'ici Noël dans le secteur de la musique et des concerts, ainsi qu'une baisse de 80% des revenus. Pour l'économiste Chris Carey qui a co-signé ce rapport, "tout un écosystème est en train d’être décimé par cette crise". Par ailleurs, il faut ajouter que depuis le début de la pandémie, environ la moitié des musiciens a dû chercher du travail hors du domaine musical, tandis que plus d’un tiers n’ont pas de travail du tout. On comprend donc mieux, dans ce contexte, pourquoi la Royal Opera House a vendu aux enchères un portrait de Sir David Webster, réalisé par David Hockney, dans l'espoir de combler en partie les pertes générées par la crise sanitaire mondiale des derniers mois. Une vente qui a finalement rapporté £ 12.865.000, et qui devait notamment "contribuer à permettre aux plus grands artistes mondiaux de regagner nos scènes". Du moins, si le confinement ne gagne pas l'ensemble des pays européens comme pourrait le laisser présager le discours d'Emmanuel Macron...

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