Une drolatique Italienne à Alger à l'Opéra national Montpellier Occitanie

Xl_l_italienne___alger © Marc Ginot

La production de L'IItalienne à Alger de Gioacchino Rossini imaginée par David Hermann - et donnée à l’Opéra National de Lorraine avec succès en février 2012 - réussit avec brio son transfert à l’Opéra national Montpellier Occitanie. Le metteur en scène franco-allemand rend à merveille la fulgurance de cet opéra composé en vingt-sept jours par un musicien tout juste âgé de 21 ans. De fait, le spectacle fait mouche de bout en bout, tapageur ou guilleret, virtuose et enlevé, multipliant les gags hilarants. On est d’abord impressionné par l’imposant dispositif scénique conçu par Rafail Ajdarpasic, qui présente la carcasse éventrée d’un avion venu s’écraser sur quelque île du Pacifique, au milieu d’indigènes arborant des masques tribaux. Certaines scènes provoquent sourires ou franche hilarité, tel Lindoro qui a trouvé refuge dans le réacteur évidé de l’aéronef ou la fameuse scène du pal, ici transformée en méchoui, dans laquelle le malheureux Taddeo se retrouve enduit de graisse... pour mieux rôtir ! Impayable également le quintette du II « Ti presento di mia man » qui, suite au redémarrage accidentel du second réacteur, emporte tous les protagonistes dans un véritable tourbillon (avec ceintures de sécurité, gilets de sauvetages et masques à oxygène volant en tous sens), faisant ainsi génialement écho à la musique. 

Sur le plan vocal et scénique, le plateau est dominé par l’étourdissant et désopilant baryton argentin Armando Noguera dans le rôle de Taddeo. Il ne compte pas sa peine pour incarner son personnage de poltron magnifique, et sait doser les effets pour s’attirer la sympathie du public. Avec quelques effets spectaculaires dans l’octave supérieure et une musicalité jamais prise en défaut, la mezzo polonaise Hanna Hipp est une Isabella pleine de charme qui joue la femme fatale et déterminée à la perfection. Plus légère dans le médium et les graves, la voix a en revanche tendance à disparaître dans le délirant vacarme des ensembles. La prestation du ténor australien Alasdair Kent laisse perplexe par ses inégalités. Visiblement souffrant, il semble à certains moments gênés au point d’émettre avec difficultés ses aigus ; à d’autres, il déploie un instrument d’une grande clarté, et à la belle projection. Si la basse turque Burak Bilgili possède le physique idéal pour incarner Mustapha, doublé d'un jeu scénique très convaincant, son émission trop empesée l’empêche cependant d’assumer avec subtilité le style buffo requis par sa partie. Enfin, le Haly du baryton britannique Daniel Grice est à la fois stylé et sonore, tandis que Pauline Texier (Elvira) et Marie Kalinine (Zulma) s’avèrent deux comprimarie parfaitement fiables.

Pour son premier ouvrage lyrique dans la fosse montpelliéraine, Michael Schonwandt - chef principal invité de l’Orchestre national Montpellier Occitanie - convainc de bout en bout, et fait pétiller cette éblouissante partition, surtout dans l’ouverture. Avec des tempi parfois précipités jusqu’à la frénésie, le chef danois apporte à la soirée une verve et une théâtralité jouissives... qui lui valent des hourras au moment des saluts !

Emmanuel Andrieu

L’Italienne à Alger de Gioacchino Rossini à l’Opéra Comédie de Montpellier, jusqu’au 1er octobre 2017

Crédit photographique © Marc Ginot

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