Un touchant Pays du sourire à l'Opéra Confluence d'Avignon

Xl_sourire1 © Cédric Delestrade

A la différence de La Veuve joyeuse, qui parle aussi d’un mariage en porte-à-faux, Le Pays du sourire du même Franz Lehar se veut sérieux. Les personnages souffrent : la comtesse Lisa épouse par amour le prince Sou-Chong, mais les différences culturelles et l’obligation de la polygamie ont raison de leur union. Dans sa version française, mouture retenue par l’Opéra Grand Avignon pour cette coproduction avec l’Opéra de Tours, le livret est de ceux où les clichés se bousculent, mais c'était sans compter sur le travail sensible et intelligent du metteur en scène français Pierre-Emmanuel Rousseau, qui signe également les magnifiques décors et costumes du spectacle. La proposition scénique respecte les lieux et le temps de l’action (la Vienne des Années 1910 au I et la Chine traditionnelle au II et III), mais accentue le caractère mélancolique et dramatique de l’histoire, notamment à travers le personnage de Sou-Chong qui, à chaque moment de conflit intérieur entre tradition et passion, se réfugie dans les vapeurs de l’opium, jusqu’à en mourir, à la fin du III, sous les yeux de sa sœur Mi effondrée.

Très investi dans son personnage torturé, Sébastien Droy offre par ailleurs à Sou-Chong des aigus sûrs et une diction parfaite, tandis qu’Amélie Robins campe une touchante Lisa, avec son beau soprano, lyrique et dense à la fois, mais qui pêche parfois en termes d’intelligibilité. La pétillante Norma Nahoun incarne une gracieuse Mi, vive et chatoyante. De son côté, l’excellent baryton français Marc Scoffoni – superbe Michonnet (Adriana Lecouvreur) le mois précédent à Saint-Etienne – donne un grand relief au personnage de Gustave, quand Francis Dudziak, avec son impressionnante stature, rend perceptible l’intransigeance de Tchang, en bon « gardien du temple » qu’il est.

Sous la baguette aussi experte qu’amoureuse de Benjamin Pionnier, l’Orchestre Régional Avignon Provence exhale tous les parfums délicats – et quelque peu surannés – de la partition de Lehar, qui mêle de manière savante sonorités orientales et occidentales, pour le plus grand bonheur des auditeurs. Saluons, enfin, le Chœur de l’Opéra Grand Avignon qui remplit dignement leur office, ainsi que la chorégraphe Elodie Vella à qui l’on doit le très beau ballet de l’acte II.

Emmanuel Andrieu

Le Pays du sourire de Franz Lehar à l’Opéra Confluence d’Avignon, le 11 mars 2018

Crédit photographique © Cédric Delestrade

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