Eva-Maria Westbroek sauve la Wally à l'Opéra de Monte-carlo

Xl_la_wally_ © Alain Hanel

Les illustres patronages de Toscanini et de Mahler n'ont jamais suffi à imposer au répertoire La Wally d'Alfredo Catalani, un opéra dont l'action – tirée du roman à succès de Wilhelmine von Hillern Die Geierwally – se situe au Tyrol (et a fait l'objet de plusieurs adaptations cinématographiques). Nous n'avions pas beaucoup aimé cette production (signée par Cesare Lievi) - et n'en avions pas dit grand bien -, quand elle avait été étrennée, l'an passé, au Grand-Théâtre de Genève... mais peut-être que le metteur en scène italien s'est senti trop étranger au monde kitsch que symbolise Die Geierwally pour pouvoir en proposer une lecture qui n'ait pas besoin de s'en distancier artificiellement ?... Le fait est que l'on retrouve une direction d'acteurs à minima... et surtout les mêmes toiles peintes datant d'une autre ère - celle de grand-papa -, que l'on pensait pourtant révolue...

Heureusement, la seule présence de la magnifique soprano néerlandaise Eva-Maria Westbroek méritait le voyage jusqu'à l'Opéra de Monte-Carlo. La puissance et la chaleur de la voix continuent d'impressionner et permettent de faire sentir la forte personnalité de Wally. Nos oreilles se souviendront longtemps de son cri « Io lo vo morto ! », d'un formidable impact émotionnel, de même que ses duos avec Hagenbach et Gellner, qui bénéficient d'une déclamation pour le moins passionnée. L'orgueil et la fierté sont parfaitement traduits par l'agressivité de l'instrument, qui sait également se faire plus souple quand l'héroïne doit exprimer amour et tendresse. Westbroek est une grande Wally, comme elle avait été (dans un autre ouvrage du répertoire vériste) une superbe Francesca da Rimini (Zandonaï) - in loco - en mars 2012.

Les autres personnages sont musicalement et dramatiquement un peu en retrait, même s'il faut reconnaître que Catalani a soumis à rude épreuve ténor et baryton. Dans le rôle d'Hagenbach, le ténor serbe Zoran Todorovitch déçoit : dès le récit du premier acte, la voix apparaît forcée, instable, parfois même laide, avec une puissance synonyme de vocifération et, à l'arrivée, des accidents dans la ligne. Le baryton italien Lucio Gallo souffre également de l'écriture vocale de Gellner, avec lui aussi de pénibles efforts et quelques incidents de parcours. La basse coréenne In-Sung Sim se tire mieux d'affaire, et s'avère crédible en vieux Stromminger, usé et vieilli, tandis qu'Olivia Doray apporte au travesti de Walter la fraîcheur de son timbre léger, et que Marie Kalinine retient l'attention dans le rôle d'Afra, tant pour des raisons vocales que scéniques.

Placé à le tête des forces de l'Opéra de Monte-Carlo, le chef italien Maurizio Benini - de toute évidence amoureux de cette partition - se montre très attentif à la précision comme au rythme. Sa battue fait preuve d'élégance autant que de flexibilité, mais aussi de panache et d'éloquence, comme dans le Finale du III ou le somptueux Prélude du quatrième acte, assurément la plus belle page de toute la production musicale du compositeur italien.

Emmanuel Andrieu

La Wally d'Alfredo Catalani à l'Opéra de Monte-Carlo, les 21, 24, 27 & 30 janvier 2016

Crédit photographique © Alain Hanel

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