Cavalleria Rusticana & I Pagliacci à l'Opéra de Toulon

Xl_cavalleria © Frédéric Stéphan

C'est avec le doublé Cavalleria Rusticana / I Pagliacci que l'Opéra de Toulon vient d'ouvrir sa nouvelle saison, en important une production signée par Paul-Emile Fourny pour l'Opéra-Théâtre de Metz en juin dernier. Alors que le spectacle nous avait globalement plu dans la cité lorraine, force est de constater qu'il a mal vécu le voyage... Premièrement, il a perdu les belles images vidéos qui rehaussaient le premier ouvrage, mais, surtout, la direction d'acteurs – déjà discrète à Metz – est carrément passée à la trappe dans la reprise toulonnaise, (mal) confiée aux mains de Sylvie Laligne. Abandonnés à eux-mêmes, les chanteurs-acteurs s'en sortent avec des bonheurs divers...

Dénicheur de talent, Claude-Henri Bonnet a su trouver une perle rare avec la soprano turque Deniz Yetim qui offre un saisissant portrait vocal et scénique de Santuzza. Sa voix large et superbement timbrée se coule sensuellement dans cette musique pour en faire brillamment ressortir le pouvoir expressif. Nous lui prédisons une belle carrière. Dans le rôle de Turridu, le ténor italien Lorenzo Decaro délivre des aigus puissants jusqu'à en paraître parfois gras et séduit plus par la violence extravertie de son chant que par la souplesse expressive. Le baryton mexicain Carlos Almaguer - superbe Scarpia l'année dernière à l'Opéra voisin de Marseille - est un Alfio plein d'arrogance vocale, quand Marie-Ange Todorovitch campe une Mama Lucia très présente et Anna Kasyan une Lola aux intonations aguicheuses.

En seconde partie de soirée, le ténor géorgien Badri Maisuradze déçoit dans le rôle de Canio qu'il chante avec un italien défaillant et un phrasé banal, entièrement cantonné dans la nuance forte, au détriment de la psychologie de son personnage. De son côté, Anna Kasyan est une Nedda piquante et fort bien chantée quand Carlos Almaguer offre un Tonio vipérin et menaçant à souhait. Le baryton britannique Charles Rice possède le timbre séducteur et l'accent de velours qui sied au personnage de Silvio, tandis que le ténor italien Giuseppe Tommaso laisse une impression positive en Beppe.

Passées quelques (étonnantes) approximations dans l'ouverture, la direction de Giuliano Carella – directeur musical émérite de l'Orchestre de l'Opéra de Toulon – s'avère un exemple d'équilibre dans la recherche de timbres et de connaissance intime de ce répertoire : chaque tempo est à la fois juste et théâtralement efficace, chaque détail instrumental est mis en valeur au moment où il faut. Quant au Chœur de l'Opéra de Toulon, il se montre vocalement aussi engagé qu'efficace.

Pour la petite histoire, le concert devait être retransmis en direct sur Radio Classique, mais une section de câbles dans le 8e arrondissement de Paris a repoussé au lendemain l’événement !

Emmanuel Andrieu

Cavalleria Rusticana & I Pagliacci à l'Opéra de Toulon – Les 4, 7 et 9 octobre 2016

Crédit photographique © Frédéric Stéphan

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