Chronique d'album : Antonio Vivaldi, de Cecilia Bartoli

Xl_album_bartoli © DR

Nous évoquions récemment l’anniversaire de Cecilia Bartoli avec sa maison de disque, Decca, et les divers projets qui y sont associés. Parmi ceux-ci, la parution d’un disque entièrement dédié à Vivaldi, attendu le 23 novembre prochain (et non le 16 comme annoncé initialement), enregistré avec l’ensemble Matheus et Jean-Christophe Spinosi.

Bien sûr, cet Antonio Vivaldi n’est pas sans rappeler le Vivaldi sorti en 1999, alors avec le chef Giovanni Antonini  et Il Giardino Armonico, qui eut « l’effet d’une bombe » comme le rappelle le livret. « Ce fut un déclic pour un public nombreux qui, charmé par l’interprétation fascinante de ces airs merveilleux, se découvrit une passion pour la musique baroque en générale et pour les œuvres vocales de Vivaldi en particulier ». Vingt ans plus tard, la cantatrice retrouve un autre ensemble spécialiste du genre, comme le rappelle toujours le livret, et Jean-Christophe Spinosi, « chef plein de tempérament » dont l’énergie et la fougue se retrouvent dès le premier air, « Se lento ancora il fulmine » extrait d’Argippo (1730). Les premières notes emportent ainsi l’auditeur dans une vive tempête instrumentale que viendra appuyer la voix de Cecilia Bartoli, énergique, sans demi-mesure et que l’on voit presque chanter devant soi tant on sent l’implication à travers l’enregistrement. La tempête se calme, et l’on entend l’épouse encore amoureuse et toute sa tristesse… La double tonalité se fait donc ressentir pleinement dans chacun de ses deux visages et ce premier titre exprime en quelques minutes à peine toute la qualité de ce qui va suivre.

La douceur est extrême, toute en retenue et en délicatesse, accompagnée avec émotion par la flûte de Jean-Marc Goujon dans « Sol da te, mio dolce amore » d’Orlando furioso, dont est également extrait « Ah fuggi rapido ». Ici, l’ensemble fait ressentir comme des vagues, un mouvement de fuite fort bien rendu, sans jamais empiéter sur l’interprétation de Cecilia Bartoli, toujours magistrale et à la technique impeccable. Que cela soit sur scène ou au disque, la mezzo-soprano parvient à nous emporter sans le moindre effort de notre part : elle happe par ses nuances, sa fougue, sa douceur, sa maîtrise du texte et l’envie de partage qui se dégage toujours. Chaque note a son importance et prend vie. Si nous avons déjà entendu maintes fois « Vedro con moi diletto » ou encore « Sovente  il sole » (accompagné ici au violon par Jean-Christophe Spinosi), on s’y plonge avec bonheur ici et l’on en redécouvre toutes les saveurs.

Le disque alterne donc différents tempi, ce qui permet de conserver toute l’attention de l’auditeur, et se clôt par « Combatta un gentil car » de Tito Manlio, vigoureux, puis par « Se mai senti spirarti sul volto » de Catone in Utica, deux œuvres moins connues. Ainsi, après s’être ouvert avec fougue et passion, le disque se referme par un air plus apaisé, une sorte d’au revoir, la musique et la voix caressant les oreilles de même que le souffle léger chanté ici.  

Quant au livret, il se trouve illustré de nombreuses photos de Cecilia Bartoli « puisés dans les archives de Decca » et illustrant « les premières années de l’extraordinaire parcours discographique de la mezzo ». Diverses citations (en anglais) de personnalités issues majoritairement du monde de la musique, mais pas seulement (on retrouve par exemple Carole Bouquet), sont également présentes et montrent l’importante influence de l’artiste sur le monde lyrique et culturel depuis toutes ces années. Enfin, le livret comprend également un texte de présentation du projet en trois langues, ainsi que les paroles des airs, également traduites en anglais, français et allemand.

Un très bel objet qui renferme un superbe enregistrement, de même qu’un écrin renfermerait un bijou de grande valeur. Sans doute un nouveau disque qui marquera à son tour l’univers lyrique.

Elodie Martinez

| Imprimer

En savoir plus

Commentaires

Loading