Stéphane Lissner réintégré à la tête du Teatro San Carlo

Xl_xl_lissner160607 © DR

On se souvient que suite à son renvoi anticipé du Teatro di San Carlo de Naples, Stéphane Lissner ne comptait pas en rester là et entendait se rendre à la Consulta, siège de la Cour Constitutionnelle italienne. Rappelons rapidement que l’unique argument de son éviction était le décret voté en mai dernier, fixant l’âge de la retraite des directeurs d’opéra à 70 ans, et ne touchant que des directeurs étrangers. Stéphane Lissner était même le seul à être impacté de façon si immédiate, tandis que Dominique Meyer – né le 8 août 1955 – le sera dans deux ans environ. De son côté, Carlo Fuortes avait dernièrement été nommé officiellement à la tête du Théâtre de Naples, suite à sa démission du poste de PDG de la RAI.

Toutefois, personne n’avait été dupe de cet imbroglio politique, et l’ancien directeur n’avait donc pas l'intention d'abandonner. Une ténacité qui a fini par payer, puisque le tribunal du travail de Naples vient de réintégrer Stéphane Lissner à son poste de directeur artistique et surintendant du Teatro San Carlo di Napoli avec effet immédiat.

La juge en charge du dossier a estimé en effet que le décret ne pouvait pas s’appliquer à la situation de Stéphane Lissner, et que quand bien même cela aurait été le cas, « les conditions seraient requises pour questionner la constitutionnalité de ce décret ». Les conclusions indiquent : « L’ordonnance conservatoire d’aujourd’hui de la juge du travail Clara Ruggiero a décidé, en effet, que le décret législatif du 10 mai 2023, n. 51 qui avait été utilisé pour anticiper la rupture de la relation de travail doit être interprété dans le seul sens qui le rend compatible avec les principes constitutionnels et les réglementations antérieures dans lesquelles s'inscrit le décret susmentionné. Cela s'applique évidemment aussi à cette disposition « contra personam », qui ne s'appliquerait qu'au Maestro Lissner, qui prévoyait le licenciement immédiat pour les surintendants de plus de soixante-dix ans, quelle que soit la date d'expiration des contrats en cours. Tout cela, comme on le sait, pour libérer le poste de surintendant du théâtre pour le Dr Fuortes et obtenir sa démission du PDG de la Rai ».

Réaction de Stéphane Lissner

Comme on pouvait s’y attendre, le principal intéressé n’a pas tardé à réagir à cette décision en saluant une « décision juste » et en ajoutant dans la presse italienne « après des mois passés dans les limbes que je ne méritais pas, et encore moins, le Théâtre San Carlo et la ville de Naples. Aujourd'hui, le Tribunal de Naples a donné le premier signal fondamental montrant que ma révocation était un acte illégitime et ad personam (…). Maintenant, je suis disponible pour accomplir ma tâche avec les personnes extraordinaires qui travaillent au Théâtre ».

Quel avenir pour le Teatro di San Carlo ?

Suite à cette décision, le Teatro di San Carlo se retrouve aujourd’hui avec deux directeurs. Une situation complexe qui amène à s’interroger sur l’avenir de l’institution. Le maire de la ville et président de la Fondation San Carlo, Gaetano Manfredi, a annoncé de son côté avoir pris acte de la décision du tribunal, et a précisé qu’il réunirait bientôt le Comité de direction de la fondation afin de rendre la réintégration effective, mais également pour « réfléchir aux possibilités de recours ». En effet, le quotidien Il Mattino rappelle que si Stéphane Lissner a un salaire de 240 000 euros, celui de Carlo Fuortes est pour sa part de 210 000 euros. Difficile d’imaginer une codirection entre les deux hommes, et l’on se doute bien que l’ancien directeur de la RAI n’est pas non plus prêt à laisser sa place sans se battre ou contrepartie. Quant au ministre de la Culture, Gennaro Sangiuliano, il préfère ne pas commenter pour l'instant.

Il n’est donc pas impossible que le feuilleton de la direction du Teatro di San Carlo réserve encore quelques épisodes.

Elodie Martinez

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