Requiem (Mozart) - Théatre lyrique du Châtelet (2019) - Requiem (Mozart) - Théatre lyrique du Châtelet (2019)

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Point de vue...

Encore une fois, il surprend, et c’est le moins que l’on puisse dire.

On sait que Teodor Currentzis casse les codes, pour mieux s’approprier la musique, pour mieux en livrer sa propre interprétation – parfois toute personnelle, mais toujours dans le respect du compositeur –, pour mieux nous inviter à redécouvrir les œuvres qu’on croit connaitre. On le sait, et c’est pour ça qu’on adore ou qu’on déteste Teodor Currentzis.
Mais c’est autre chose que d’en faire l’expérience, comme ce dimanche au Théâtre du Châtelet.

Après plus de deux ans et demi de travaux, le Théâtre du Châtelet rouvre ses portes avec une saison 2019-2020 qui se veut fidèle à la tradition du lieu : audacieuse et innovante, voire radicale. Et en fer de lance lyrique de cet esprit d’ouverture, le théâtre parisien accueille Teodor Currentzis et son ensemble musicAeterna – en résidence le temps d’une saison. Parallèlement aux tournées qui le conduisent partout à travers l’Europe, le chef grec imprégné d’âme russe a(vait) vocation à bousculer le théâtre parisien lors de plusieurs concerts – il devait notamment y donner un concert Rameau ce 29 octobre, promettait un concert surprise en fin d’année, en attendant un cycle Beethoven en mai 2020 et un Requiem de Fauré. Si ces projets sont finalement annulés, son Requiem de Mozart ce dimanche 27 octobre n’en a que plus de saveur. Comme à son habitude, Teodor Currentzis y proposait une « expérience sensorielle » au public, comme issue d’une autre dimension.

Le chef a ses rituels. En entrant en scène avec les solistes, après sa traditionnelle poignée de main à son fidèle Konzertmeister Afanasy Chupin, Teodor Currentzis adresse un bref salut à l’orchestre et au public. Il fait taire les applaudissements de l’assistance (avant même que la moindre note ne soit jouée), se recueille et... les lumières s’éteignent. Ainsi plongé dans le silence et une quasi-obscurité, au loin, avec douceur, un Introitus: Requiem Eterna se fait entendre, avec ces allures de chant grégorien. Rien de théâtral ici, tout juste quelques voix d’hommes a capella – membres du chœur MusicAeterna installés en fond de salle au cœur du public.

Puis lentement, doucement, les premières mesures de l’Introitus emplissent l’espace, portées par l’orchestre et les chœurs, dans une harmonie parfaite, ponctuées par le solo superbe de la soprane Sandrine Piau.

L’obscurité se fait pénombre, la scène se dévoile et révèle l’étrange disposition des musiciens. Les violons et les chœurs se mêlent, debout, serrés les uns contre les autres. Quatre solistes – Sandrine Piau, Paula Murrihy, Sebastian Kohlhepp et Evgeny Stavinsky –, tous magnifiques, encadrent le chef de très près et accentuent plus encore le parfait unisson de ce « klangkörper », ce corps sonore sublime qu’est l’orchestre et le chœur de musicAeterna.

L’extrême précision de la direction de Currentzis, son intransigeance absolue dans les intonations, sa capacité à faire murmurer l’orchestre jusqu'à le rendre parfois à peine audible... Le chef sculpte la partition et dissèque au scalpel les paroles de cette messe des morts. Kyrie, Dies Irae, Tuba Mirum, Rex Tremendae, Recordare, Confutatis, Lacrimosa, Domine Jesu et Hostias s’enchaînent. Currentzis connaît par cœur chaque syllabe de cette messe et sa profonde signification liturgique. Il semble détacher la musique de chaque note, pour qu’elle puisse mieux s’unir avec le sens profond de cette prière pour l’âme des défunts. Ce n’est plus un concert, c’est le témoignage d’une foi profonde qui nous emporte.

À la fin de l’Offertoire – assurément pour marquer la transition entre l’œuvre de Mozart et la suite signée de son élève Franz Xaver Süßmayr –, Currentzis intercale une fois encore quelques mesures de chant orthodoxe, Exedysan Me Ta Imatia Mou, de la plume de Konstantinos Pringos, compositeur et protopsaltes de la grande église de Constantinople. Puis, Sanctus, Benedictus, Agnus Dei et Communio viennent conclure la soirée et l’œuvre aussi simplement qu’elles ont commencé, par un moment de grâce extrême.

Lentement, le public sort alors de sa stupeur, abasourdi et enthousiaste bien sûr – comment pourrait-il en être autrement ?

Ce dimanche après-midi du 27 octobre 2019 au Théâtre du Châtelet était un moment rare, une communion magnifique entre l’Orient et l’Occident. C’était Byzance et Rome réunies !

Dates de représentations

27 octobre 2019 15:00:00

La distribution

Teodor Currentzis

Sandrine Piau

Paula Murrihy

Sebastian Kohlhepp

Evgeny Stavinsky

Personnages de l'œuvre

Chef d'orchestre

Soprano

Mezzo-soprano

Ténor

Baryton/Basse

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