Dona Francisquita au Théâtre du Capitole de Toulouse

Xl_dona_francisquita © Patrice Nin

Le Théâtre du Capitole a fait preuve d'originalité en proposant pour les Fêtes - plutôt qu'une sempiternelle opérette offenbachienne - une zarzuela espagnole, Dona Francisquita d'Amedeo Vives (1871-1932) en l’occurrence, déjà présentée in loco en 2007, avec beaucoup de succès. Pour notre première incursion dans le genre, nous avouerons être sorti l’œil rassasié, l'oreille comblée et le cœur à la fête !

Pourtant, cette comédie lyrique en trois actes, créée au Teatro Apolo de Madrid en 1923, n'entre pas dans la catégorie des chefs d’œuvres universels : comme toute les zarzuelas, elle vise avant tout à divertir, sans s'encombrer d'un livret psychologiquement fouillé ni d'une musique particulièrement savante. Les personnages sont taillés à gros traits et les péripéties de l'intrigue sont plus ou moins prévisibles : une jeune et jolie madrilène, Dona Francisquita, multiplie ruses et stratagèmes pour que l’homme qu'elle aime, épris d’une autre, finisse par succomber à ses charmes. Quant à la partition, elle ne réserve pas de grandes audaces harmoniques. Et pourtant, porté par les rythmes d'une musique espiègle et vivante - notamment par le flamenco et le zapateado du III qui a fait un tabac sur le public toulousain -, on se laisse rapidement prendre au charme de ces mélodies entraînantes, faciles certes, mais jamais banales ni vulgaires.

Elles sont, il est vrai, admirablement dirigées par l'excellent chef catalan Josep Caballé Domenech, d'une infatigable énergie à la tête d'un Orchestre National du Capitole lui aussi en grande forme, et chantées par une distribution entièrement espagnole de très haut niveau - à l'exception du ténor Miguel Angel Lobato (qui alterne avec Joel Prieto dans le personnage de Fernando Soler), dont la quinte aiguë est loin d'être à la hauteur des exigences du rôle. Rien à redire, en revanche, sur la Dona Francisquita d'Elisandra Melian, dont la qualité du timbre, l'élégance des vocalises et l'intelligence du jeu n’appellent que des éloges. La pétulance d'Aurora est parfaitement rendue par Clara Mouriz, chanteuse au mezzo chaud et rond et actrice sensuelle. Jesus Alvarez nous gratifie de ses dons de comédiens (il se travestit pour aider son ami Fernando) en même temps que de son éclatant ténor. Francisca, la mère de Francisquita, qui lorgne sur le même homme que sa fille, trouve dans la faconde de Pilar Vazquez une interprète idéale. Enfin, Leonardo Estevez campe un Don Matias plein de prestance, avec une voix de baryton ferme et sonore.

Le spectacle d'Emilio Sagi enfin, est un modèle d'élégance et de sobriété, qui nous offre moult tableaux plaisants de la vie madrilène des années 1840, sans tomber dans un pittoresque de pacotille. Les costumes de Franca Squarciapino sont d'un chic impeccable tandis que les magnifiques éclairages d'Eduardo Bravo éclabousse de soleil ces saynètes madrilènes plus vraies que nature.

Servie avec autant d'intelligence et de sérieux, la zarzuela mérite de sortir des frontières espagnoles où elle est malheureusement presque exclusivement cantonnée.

Emmanuel Andrieu

Dona Francisquita au Théâtre du Capitole de Toulouse

Crédit photographique © Patrice Nin

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