Barbe-Bleue à Angers Nantes Opéra

Xl_barbe-bleue © Jeff Rabillon

Étrennée à Maastricht en 2012, reprise à l'Opéra National de Lorraine la saison passée, puis à Nantes et à  Rennes le mois dernier, c'est finalement au Grand-Théâtre d'Angers que cette production du rare Barbe-Bleue de Jacques Offenbach finit son périple. Signée par Waut Koeken, nous ne l'avions guère goûté quand il nous avait été donné de voir le spectacle à Nancy l'an dernier, et nous renvoyons le lecteur aux commentaires qu'il avait alors suscité de notre part (notons au passage que Koeken a autrement réussi sa Vie Parisienne, du même Offenbach, donné à l'Opéra National du Rhin pour les Fêtes de fin d'années). Par chance, il a confié à son assistante Friederike Schulz le soin de la reprise, et cette dernière a eu la bonne idée d'expurger toutes les scories et les lourdeurs qui plombaient la mise en scène originale, notamment les innombrables allusions à l'actualité politico-médiatique, mais aussi l'inutile scène de « tabassage » et autres grivoiseries gratuites... Bref, on assiste à Angers à un tout autre spectacle, et nous sortirons de celui-ci ravi...

...d'autant que la distribution vocale réunie par Jean-Paul Davois s'avère un cran au dessus de celle entendue à Nancy (pourtant satisfaisante), à commencer par le rôle-titre confié ici au jeune et talentueux ténor français Mathias Vidal, qui possède toute la truculence et l’ambiguïté exigé par ce personnage (à la fois amoureux et impitoyable), mais aussi une déconcertante facilité dans le registre aigu. C'est Carine Séchaye qui incarne Boulotte, la sixième épouse de Barbe-Bleue qui est une solide campagnarde aimant la vie et les hommes : la mezzo suisse assume sa partie avec l'abattage et la résistance indispensables dans ce rôle central. La septième femme est un petite bergère adorable, Fleurette, fille perdue et retrouvée par le Roi Bobèche, sur le point d'épouser le jeune berger Daphnis (le Prince Saphir en fait...) ; le couple est interprété avec beaucoup de fraîcheur et d'humour par Gabrielle Philiponet et Loïc Félix. L'action se passe en grande partie à la cour du Roi Bobèche, personnage mégalomane et hypocondriaque, magistralement et loufoquement campé par le ténor montpelliérain Raphaël Brémard. Son ministre est l'excellent comédien (mais également bon chanteur) Flannan Obé, qui nous avait déjà ravi il y a deux saisons à l'Opéra de Saint-Etienne, dans une autre opérette d'Offenbach, L'île de Tulipatan. Le chanteur belge Pierre Doyen, baryton au phrasé nuancé, incarne l'inquiétant alchimiste Copolani. Enfin, seule « rescapée » de la distribution nancéienne, Sophie Angebault campe une imposante Reine Clémentine, tant vocalement que scéniquement.

Quant à la direction musicale de Laurent Campellone, placé à la tête d'un brillant Orchestre National des Pays de la Loire, elle est un véritable feu d'artifice de couleurs et de sonorités aussi pétillantes que variées. On devra rajouter à ses nombreux talents son incroyable don pour la comédie, comme il en apporte la preuve pendant le précipité entre les deux derniers actes, où il livre un impayable numéro de fêtard aviné, qui a fait se tordre de rire le public angevin.

Emmanuel Andrieu

Barbe-Bleue de Jacques Offenbach au Grand-Théâtre d'Angers, les 11, 13 & 15 janvier 2015

Crédit photographique © Jeff Rabillon

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