
Le Metropolitan Opera donne une nouvelle production de Salomé, de Strauss, dans une mise en scène de Claus Guth – sa première réalisation pour la salle new-yorkaise. La production fait l’objet d’une retransmission en direct au cinéma ce 17 mai 2025.
Claus Guth est bien connu en Europe depuis plus d’une vingtaine d’années. Pour autant et curieusement, le metteur en scène allemand n’avait encore jamais officié au Metropolitan Opera de New York. Oubli réparé depuis 29 avril dernier : Claus Guth signe une nouvelle production de Salomé, de Richard Strauss, qui fait l’objet d’une retransmission en direct dans la plupart des cinémas du monde ce samedi 17 mai.
Quand Peter Gelb, le directeur du Metropolitan Opera, l’a contacté pour mettre en scène Salomé, Claus Guth avait déjà signé une production de l’opéra de Strauss pour le Deutsche Oper de Berlin. Pour ses débuts dans l’institution, Claus Guth entendait néanmoins proposer une nouvelle lecture de l’ouvrage, « quelque chose de totalement différent », pour répondre à un besoin « de prendre des risque » et de ne pas « s’ennuyer à faire toujours les mêmes choses ».
Salomé, « une jeune femme évoluant dans un monde régi par des règles étranges, prisonnière d’un carcan familial trop strict »
Pour cette nouvelle production, Claus Guth imagine ainsi une scénographie en clair-obscur, oppressante, inspirée (au moins partiellement) par Eyes Wide Shut, le film sulfureux de Stanley Kubrick – avant de se consacrer à la mise en scène théâtrale, Claus Guth se rêvait réalisateur de cinéma. Dans sa proposition scénique, des personnages (parfois nus) déambulent sur une scène en noir et blanc, arborant des masques de bélier, alors qu’une petite fille (vraisemblablement Salomé enfant) joue avec une poupée avant de la casser frénétiquement... Le metteur en scène entend ainsi illustrer les mœurs corsetées de la société victorienne décrites par Oscar Wilde dans sa pièce qui inspire l’opéra : Claus Guth indique avoir voulu « donner vie à ce système rigide et ces frontières invisibles entre ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas », et y suivre « une jeune femme évoluant dans un monde régi par des règles étranges, prisonnière d’un carcan familial trop strict ».
La Danse des sept voiles, passage emblématique de l’ouvrage généralement abordé sous la forme d’un strip-tease séducteur, est ainsi détournée : la mise à nu imaginée par Claus Guth prend des allures de danse de l’esprit et du subconscient de l’héroïne, qui se décline en sept versions de Salomé – dont l’une est incarnée par la soprano Elza van den Heever qui chante le rôle-titre. Dans la lecture de Claus Guth, Salomé est un personnage vulnérable, oppressée par une société maltraitante, en perte de repères face au Jochanaan interprété par Peter Mattei.
Selon Peter Gelb, Claus Guth est aujourd’hui l’un des rares metteurs en scène d’opéra capables de proposer une lecture d’œuvre à la fois originale et compréhensible par le public « sans avoir à lire le programme de salle ». Et si Claus Guth travaille pour la première fois au Metropolitan Opera, ce ne sera manifestement pas la dernière : l’institution new-yorkaise a d’ores et déjà annoncé les reprises de ses productions de Semele de Haendel en coproduction avec l'Opéra d'État de Bavière et de sa Jenufa créée au Royal Ballet and Opéra de Londres en 2021 (et reprise en début d’année avec Corinne Winters).
D’ici là, le public new-yorkais peut découvrir sa Salomé jusqu’au 24 mai prochain, avec Elza van den Heever dans le rôle-titre, Peter Mattei en Jochanaan et Gerhard Siegel dans le rôle du roi Hérode, accompagnés par le chef Yannick Nézet-Séguin à la baguette. La représentation de ce samedi 17 mai fait l’objet d’une retransmission en direct au cinéma dans de nombreux pays à travers le monde, dont la France. On trouve la liste des cinémas partenaires par ici.
publié le 14 mai 2025 à 13h52 par Aurelien Pfeffer
14 mai 2025 | Imprimer
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