Opéra et cinéma : conversation avec Jonas Kaufmann

Xl_jonas-kaufmann © DR

L’opéra est évidemment un art vivant qui s’apprécie d’abord dans les salles de spectacles. Pour autant, l’opéra s’invite aussi de plus en plus régulièrement dans les salles de cinéma qui en retransmettent, en direct ou en différé, les productions les plus emblématiques. Jonas Kaufmann discute avec nous des enjeux de l’opéra au cinéma, tant pour le public que pour les chanteurs... alors que le ténor allemand s'improvise aussi acteur de cinéma – il fait une apparition aux côtés de John Malkovich et Veronica Ferres dans Casanova Variation, le film de Michael Sturminger attendu dans les salles françaises le 19 novembre prochain. Nous y reviendrons prochainement.

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Quel est votre point de vue sur l’intérêt des diffusions d’opéras dans les salles de cinéma ?

Je pense que c’est une excellente initiative à tous égards. En premier lieu, elle est démocratique puisqu’elle touche un large public – et pas seulement quelques privilégiés qui ont les moyens de voyager dans le monde entier. Autre avantage de taille : en tant que spectateur, vous vous rapprochez de l’action sur scène et vous vivez de plus près les moments forts en émotion du drame. Autrement dit, dans l’idéal,  une bonne réalisation vidéo doit pouvoir intensifier l’expression émotionnelle. Par comparaison aux diffusions d’opéras à la télévision, je tiens à souligner un autre avantage très important : le fait d’être en compagnie d’autres personnes, de partager une formidable expérience, d’écouter et de voir la réaction du public. J’aime l’idée que dans certaines « représentations au cinéma », le public est presque aussi enthousiaste qu’à l’opéra, n’hésitant pas à applaudir !   

Ces diffusions peuvent-elles ouvrir l’opéra à un nouveau public ? Quel est donc le public à gagner ainsi ?

Il ne faut pas oublier que de nombreuses personnes s’intéressent à l’opéra mais qu’elles doivent surmonter leurs inhibitions pour franchir la porte d’un opéra. Elles ne se sentent pas à l’aise dans une atmosphère « d’élitisme » et « d’initiés », alors qu’elles sont parfaitement à l’aise dans un cinéma. C’est le public que j’espère « conquérir ». Et bien entendu, nombre de personnes peuvent s’offrir un billet de cinéma plus facilement qu’un billet d’opéra. 

Modifiez-vous votre jeu en scène quand vous savez qu’un spectacle est filmé ?

Je ne dirais pas ça. Si le jeu en scène est authentique, il le sera également à l’écran. Ce n’est pas une question de gestuelle, l’important est la crédibilité du personnage que vous incarnez.

Avez-vous des exigences particulières en ce qui concerne la réalisation cinématographique ?

Il faut se concentrer sur ce qui est essentiel à l’histoire, les personnages et le contenu émotionnel. Dans l’idéal, un bon réalisateur vidéo doit être en mesure de créer une nouvelle dimension de suspense grâce aux compétences cinématographiques.  Par contre, il y a toujours le risque de passer à côté de certaines informations que vous captez lorsque vous assistez au spectacle en direct. 

Avez-vous travaillé à l’opéra avec des réalisateurs de cinéma ?

Oui, j’ai joué à Paris dans « Werther » mis en scène par Benoît Jacquot  et j’ai travaillé avec François Girard qui a signé la mise en scène du nouveau « Parsifal » au Met.

Avez-vous été sollicité par le cinéma pour jouer dans un film, en dehors de l’opéra ?

J’ai déjà fait mon premier film ! Je jouais un rival de Casanova dans “The Giacomo Variations” de Michael Sturmingers, avec John Malkovich dans le rôle principal. Le film sortira à la fin de l’année.

Avez-vous des désirs en matière de cinéma : quels types de rôles souhaiteriez-vous interpréter ?

Sachant que j’ai toujours envié mes collègues barytons pour des rôles tels que Iago et Scarpia, j’aimerais jouer un rôle du méchant.  

Avec quel cinéaste aimeriez-vous travailler ?

Martin Scorsese. Il y a tellement de choses que j’aime dans ses films, notamment le « timing musical ».

Propos recueillis par Alain Duault

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