L'Opéra de Paris présente sa saison anniversaire 2018-2019, entre tradition et modernité

Xl_opera-de-paris-saison-2018-2019 © DR

En sa qualité d’opéra national, historiquement, l’Opéra de Paris a pour mission de préserver le patrimoine lyrique et de faire vivre l’opéra français. Pour autant, l’opéra est évidemment un art résolument vivant et depuis le début de son mandat à la tête de l’établissement parisien, Stéphane Lissner a aussi à cœur de contribuer au renouvellement du répertoire lyrique et d’œuvrer à la diversification de l’offre culturelle de la « Grande boutique » qui, en plus de sa 3e Scène (cette offre numérique diffusée en ligne, parallèlement aux scènes plus tangibles du Palais Garnier et de Bastille), entend développer son offre culturelle en multipliant les partenariats avec les hauts lieux de culture au travers d'expositions (sur Degas à l'Opéra au musée d'Orsay ou sur l'opéra aux XXe et XXIe siècles au Centre Pompidou-Metz), de conférences ou encore de masterclasses...
Et manifestement, alors que l’Opéra de Paris fêtera un double anniversaire en 2019 – les 350 ans de la création par Louis XIV, le 28 juin 1669, de l’Académie royale de musique, et les 30 ans de l’Opéra Bastille inauguré en 1989 –, cette double mission sert de fil rouge à une saison 2018-2019 de l’Opéra de Paris que Stéphane Lissner présentait ce soir au public à l'occasion d'une grande soirée au Palais Garnier, ponctuée d'intermèdes musicaux offrant un avant-goût des productions à venir – avec Julie Fuchs chantant Rameau (Papillon inconstant, puis Les Sauvages avec Florian Sempey, extraits des Indes Galantes), Philippe Sly en Don Giovanni, Karine Deshayes interprétant Nobles Seigneurs salut (les Huguenots) ou encore Ludovic Tézier et Sondra Radvanovsky dans un extrait de Simon Boccanegra

L'opéra français à l'honneur

Au cœur de cette saison 2018-2019, l’Opéra de Paris entend donc mettre le répertoire français à l’honneur. La saison de Bastille doit ainsi s’ouvrir avec Les Huguenots, de Meyerbeer (en écho à l’extrait de l’œuvre donné lors de l’inauguration du Palais Garnier en 1875), dans une nouvelle production mise en scène ici par Andreas Kriegenburg et dirigée par Michele Mariotti, réunissant notamment Diana Damrau, Ermonela Jaho et Karine Deshayes ou encore Bryan Hymel et Florian Sempey ; avant de se poursuivre avec un autre fleuron du genre, Les Troyens, de Berlioz (qui avait inauguré Bastille en 1990), dans une nouvelle mise en scène de Dmitri Tcherniakov, avec Elina Garanca (pour une prise de rôle) et Bryan Hymel, Stéphanie d'Oustrac et Stéphane Degout.
Parallèlement aux grands opéras à la française, Stéphane Lissner est fidèle à la tradition qu’il a instaurée voici quelques années et s’attèle à renouveler le répertoire : l’Opéra proposera donc de nouveau une création mondiale adaptée des grandes œuvres de la littérature française, Bérénice (en attendant le Soulier de Satin la saison suivante, d'après Claudel et composé par Marc-André Dalbavie) commandée au compositeur de Michael Jarrell, mise en scène ici par l'enfant terrible Claus Guth et dirigé par Philippe Jordan – avec dans le rôle-titre Barbara Hannigan, dont on connait le goût pour l’opéra contemporain. Et comme cette saison anniversaire doit s’étirer jusque fin 2019, Stéphane Lissner annonce également une nouvelle production des Indes Galantes, dont la mise en scène est confiée à Clément Cogitore (qui, l'année dernière sur la 3e Scène, faisait se rencontrer l'oeuvre de Rameau et le krump des ghettos de Los Angeles) et devrait réunir Sabine Devieilhe, Florian Sempey, Jodie Devos, Julie Fuchs ou encore Stanislas de Barbeyrac. Pour compléter ce tableau, la maison parisienne reprendra la Carmen de Calixto Bieito, pour accueillir notamment Anita Rachvelishvili et Roberto Alagna, dirigée ici par le jeune chef Lorenzo Viotti.

De nouvelles productions

Parallèlement à cette reprise, on retrouvera de nouveau Calixto Bieito à la mise en scène d’un nouveau Simon Boccanegra alléchant, avec notamment Ludovic Tézier aux côtés de Maria Agresta. On retient tout autant la nouvelle production de Lady Macbeth de Mzensk confiée au metteur en scène Krzysztof Warlikowski ou encore le très rare Il primo omicidio, de Scarlatti, ici mis en scène par Romeo Castellucci (qui dit apprécier s’atteler à une œuvre méconnue, pour la liberté qu’elle offre au metteur en scène et le plaisir de la découverte qu’elle promet au public). Afin de poursuivre le cycle Mozart / Da Ponte, l'Opéra de Paris programme une nouvelle production de Don Giovanni, en fin de saison (Les Noces de Figaro suivent en 2019-2020), confiée au metteur en scène de théâtre Ivo van Hove et dirigé par Philippe Jordan – avec Etienne Dupuis dans le rôle-titre (pour une prise de rôle) ou Philippe Sly pour son premier Leporello.

Et dans le cadre de sa saison 2019-2020, l'établissement parisien confiera également une nouvelle production du Prince Igor à l'enthousiasmant Barrie Kosky (on se souvient notamment de sa Flûte Enchantée enchanteresse). 

Et toujours des voix

Cette nouvelle saison annonce également plusieurs reprises qui seront l’occasion d’accueillir quelques grandes voix sur la scène parisienne : la reprise de l’Otello mis en scène par Andrei Serban sera notamment marquée par la prise de rôle de Roberto Alagna dans le rôle-titre ; la Tosca de Pierre Audi en juin 2019 accueillera Jonas Kaufmann, aux côtés d'abord d'Anja Harteros (également dans la reprise de la Forza del Destino, avec la ténor américain Brian Jagde pour sa première interprétation de Don Alvaro) et ensuite de Sonya Yoncheva ; le Don Pasquale de Damiano Michieletto qu'on pourra voir en juin prochain à Paris sera repris en mars 2019 avec notamment Pretty Yende pour sa première Norina ; et L'Elisir d'Amore de Laurent Pelly sera notamment interprété par Vittorio Grigolo.
Si la Cenerentola de Guillaume Gallienne peinait à enthousiamer cette saison, Isabelle Druet et Chiara Skerath seront rejointes par Marianne Crebassa. La Traviata de Benoit Jacquot déjà vue plusieurs fois (ici avec Aleksandra Kurzak et Jean-François Borras fin 2018) augure la nouvelle production de l'opéra de Verdi de la saison 2019-2020 confiée cette fois au jeune Simon Stone, avec notamment Pretty Yende (pour une prise de rôle) et Benjamin BernheimLa Flûte Enchantée très sage de Robert Carsen laissera la part belle à une distribution très française, entre Julien Behr et Nicolas Testé, Jodie Devos ou Vannina Santoni, entre autres, alors que la très poétique Ruzalka du même metteur en scène accueillera Camilla Nylund dans le rôle-titre (qu'elle a déjà interprété dans toutes les grandes capitales lyriques) et Klaus Florian Vogt, sous la baguette de Susanna Mälkki. Cette saison 2018-2019 sera tout autant l'occasion de (re)voir la très belle production de Iolanta créée en 2016 (Sonya Yoncheva laisse néanmoins sa place à la jeune Valentina Naforniţa). 

Depuis sa prise de fonction à la tête de l’Opéra de Paris, Stéphane Lissner s’attache à concilier modernité et tradition et manifestement, cette nouvelle saison suit de nouveau cette double approche – entre œuvres de répertoire et créations, nouvelles productions (souvent confiées à des metteurs en scène avant-gardistes) et reprises accueillant tantôt quelques-unes des plus grandes voix des scènes lyriques, tantôt de jeunes talents (en prenant soin, cette fois, de faire appel à la jeune garde française)... Et manifestement, la recette semble efficace puisque Stéphane Lissner revendique une hausse du nombre de spectateurs (+7%) et, en 2017, « un record absolu de recettes de billetterie avec 73 millions d'euros contre 69 millions » l’année précédente et qui pourrait permettre à la Grande Boutique d’équilibrer son budget, « voire de dégager un bénéfice malgré la baisse de la subvention publique » (que le directeur compense par la hausse du mécénat, qui atteint 15,7 millions d’euros en 2017).
Reste à déterminer si cette nouvelle saison, particulièrement riche et dont le détail est maintenant disponible sur le site de l'Opéra de Paris en prévision de l'ouverture de la billeterie ce 30 janvier, permettra de faire aussi bien. 

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