Gala Händel de l’Académie Jaroussky à La Seine Musicale

Xl_recital-philippe-jaroussky © (c) Amandine Lauriol

Pour tous ceux qui le connaissent ou ont travaillé avec lui, ce projet lui ressemble : généreux, ouvert, exigent et accessible à tous. Au sommet de sa carrière, Philippe Jaroussky a créé une grande académie de talents à La Seine Musicale.

Dirigée par Sébastien Leroux, l’Académie Jaroussky est une fondation aux multiples finalités. La part la plus attachante de cet ambitieux projet réside dans sa dimension sociale. Soucieux de rendre la musique accessible à tous (Philippe Jaroussky venant d’une famille de non-musiciens), l’Académie propose à une vingtaine d’enfants âgés de 7 à 12 ans, éloignés de la pratique musicale, un cursus gratuit de découverte de l’instrument. Les premières sessions ont commencé en septembre, grâce auxquelles les jeunes musiciens ont visité notamment l’Exposition Maria Callas et assisté à une représentation de West Side Story à la Seine Musicale, et nul doute que les enfants (et leur famille) n’aient pris le virus de la musique.

L’autre versant de l’Académie est bien sûr artistique. Désireux d’offrir leurs premiers pas à des jeunes au début de leur carrière (le contreténor a débuté à 19 ans dans la saison de concerts de Philippe Maillard), l’Académie Jaroussky propose aux 28 musiciens sélectionnés des cours et des masterclasses ouvertes au public. Le contreténor est bien sûr présent, mais l’enseignement concerne également le piano, le violon et le violoncelle avec de prestigieux professeurs (David Kadouch, Geneviève Laurenceau, Christian-Pierre La Marca). Dans son lieu de résidence, le Gala Händel signait ainsi le premier grand concert de l’Académie Lyrique qu’on espère promise à un prestigieux avenir.

Il faut saluer tout d’abord l’incroyable opportunité pour ces jeunes chanteurs (Anara Khassenova, Clarisse Dalles, Evann Loget-Raymond, Julie-Anne Moutongo-Black, Louis de Lavignère, Manon Lamaison, William Shelton) de se produire dans la grande salle de 1150 places de La Seine Musicale. Autre partenaire de choix pour ce baptême du feu : l’Ensemble Artaserse, fondé par Philippe Jaroussky en 2002, époustouflant de vélocité dès les premières mesures de l’Ouverture de Radamisto. Händel réservant une diversité incroyable d’atmosphères et d’affects, les élèves ont, chacun, l’occasion de briller en air soliste et en duo.

La soirée connaît bien sûr des fortunes diverses, mais le maître est là pour offrir tout d’abord une éblouissante leçon de programmation. Le récital s’enchaîne sans applaudissements, à la manière d’un grand concert lyrique, les chanteurs entrant et sortant de scène, sans que jamais la soirée ne devienne une succession d’airs de bravoure. Bien sûr, difficile également de passer après le contreténor, éblouissant de rage dans « Rompo i lacci » de Flavio, ou tétanisant dans l’air « Se potessero i sospir miei » d’Imeneo (plus tard, Philippe Jaroussky livre un  « Ombra Cara » d’une irradiante musicalité) et il faut saluer la témérité et l’engagement de ces jeunes chanteurs, sans doute encore un peu pétrifiés par l’enjeu. 

Pour cette première promotion « Mozart », on avouera cependant une préférence pour les talents féminins, notamment Clarisse Dalles d’une impressionnante ampleur dramatique dans « Piangero la sorte mia » de Giulio Cesare (malgré un tempérament qui demande encore à se libérer) et Manon Lamaison, lors d’un « Tornami a vagheggiar » d’Alcina tout en grâce.

Dans la foulée de ce grand concert, des masterclasses gratuites et ouvertes au public se tiennent à partir de ce lundi 11 jusqu’au vendredi 15 décembre à la Seine Musicale. Avec un tel soin et un tel dévouement à ses talents, il ne serait pas étonnant que l’Académie Jaroussky révèle bientôt l’une des grandes vedettes lyriques ou instrumentales de demain.

Laurent Vilarem

Crédit photographique : Amadine Lauriol

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