Les Pêcheurs de Perles à Salzbourg : Placido Domingo, Javier Camarena, Aida Garifullina

Xl_pecheurs-perles-salzbourg-2018 © Salzburger Festspiele / Marco Borrelli

Alors qu’un violent orage fait rage au dehors, à l’intérieur du Palais des Festivals de Salzbourg, une foule élégante attend quelques-unes des stars parmi les plus appréciées des scènes lyriques. Elles sont réunies pour interpréter une œuvre parfois méconnue et plutôt rarement donnée, alors qu'elle s’impose comme l’une des histoires d’amour et d’amitié parmi les plus romantiques de l’opéra, les Pêcheurs de Perles composé par un Georges Bizet alors débutant et âgé de seulement 24 ans. Sur l’île de Ceylan, symbolisant l’exotisme qui émoustille le public de cette fin du XIXème siècle, le chef austère et intransigeant Zurga (baryton) et le jeune et fougueux Nadir (ténor), l’un et l’autre pêcheurs de perles, sont épris de la même femme, la prêtresse Leïla. Afin de ne pas mettre leur amitié en péril, ils prêtent serment de ne pas la séduire, et quand le jeune Nadir trahira le serment, Zurga se grandira en se sacrifiant pour finalement accorder son pardon aux jeunes amants.

Les Pêcheurs de Perles, Festival de Salzbourg 2018
Placido Domingo (Zurga), Javier Camarena (Nadir)
© Salzburger Festspiele / Marco Borrelli

Et ce soir-là à Salzbourg, cette version de concert des Pêcheurs de Perles prend des allures un peu particulières. D’abord parce que le Palais des Festivals menace de ne pas résister aux éléments qui se déchainent à l’extérieur – le toit fuit sous le déluge et la représentation commencera avec retard. Mais aussi et surtout parce que la production réunit Placido Domingo, qui interprète là le personnage de Zurga pour la première fois sur scène (après avoir déjà chanté le rôle de Nadir) et inscrit ainsi un 150ème rôle à son répertoire après une très longue carrière, aux côtés des jeunes Javier Camarena et Aida Garifullina dans les rôles de Nadir et Leïla.

Après plus d’un quart d’heure d’attente, l’orchestre du Mozarteum dirigé par Riccardo Minasi se lance finalement malgré l’orage. Il compte manifestement sur le volume et les tempos hachés pour dominer les éléments, avant de progressivement magnifier la musique romantique et élégiaque qui domine la partition de Bizet. Avec le Philharmonia Choir, la musique et le drame enflent au même rythme que la poésie du livret pour remplir la grande salle du Mozarteum. Et la salle se réchauffe réellement alors que débute le célèbre duo masculin de l’Acte I.

Le vieux maître Placido Domingo convainc de nouveau dans le rôle de Zurgo. Bien sûr, le ton est juste et il met à profit son immense expérience pour masquer les tremblements liés à l’âge qui, parfois, émaillent sa voix. À ses côtés, le ténor de Javier Camarena est frais, lumineux et jeune. Il chante le rôle de Nadir par cœur sans se référer à la partition et interprète (théâtralement) le personnage dans cette version de concert, sans jamais rester statique. Enfin, Aida Garifullina incarne la belle prêtresse Leïla aimée des deux pêcheurs de perles de l'œuvre : elle est angélique dans sa robe blanche et déploie un soprano léger et argenté, parfaitement maîtrisé et peut-être parfois trop au risque d’une certaine monotonie. Les coloraturas sont artistiquement précis, et se révèlent finalement particulièrement touchants dans le duo d'amour avec Nadir.
En fin de soirée, le public ovationne ses stars favorites et réserve un accueil euphorique à l’ensemble de l’équipe artistique.

traduction libre de la chronique allemande d'Helmut Pitsch

Les Pêcheurs de Perles au Festival de Salzbourg 2018
Crédit photo : © Salzburger Festspiele / Marco Borrelli

 

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